mardi 28 septembre 2010

Vanity Fair, de Mira Nair (2005).

Après le livre... le film !


J'ai regardé cette adaptation samedi dernier, et j'ai été extrêmement séduite par le travail de Mira Nair sur le roman de Thackeray. Je trouve que celle-ci s'est magnifiquement débrouillée pour adapter ce roman de plus de mille pages, ce qui était loin d'être simple au départ. Alors bien sûr, il y a pas mal de raccourcis, mais c'était un peu inévitable ; certains éléments de l'intrigue ont été modifiés, et les personnages sont un peu plus lisses et un peu moins scandaleux que dans le roman. Mais globalement, c'est à "une belle infidèle" que nous avons affaire là : Mira Nair a su faire de cette adaptation quelque chose de moderne. Ses parti-pris sont bien sûr discutables, mais ils sont tous intéressants.

Ainsi, le générique du début met en scène, entre autres choses, un paon, animal très coloré qui convient très bien aux coloris chatoyants de l'adaptation, mais qui symbolise aussi la vanité, et dont les yeux qui figurent sur les plumes préparent à d'autres scènes du film, où le regard, dissimulé par un masque, un voile ou un éventail, a son importance.


La première scène est quant à elle assez inattendue : un homme extrêmement bien habillé descend de sa voiture pour parcourir à pieds les bas-fonds boueux de Londres. Il s'agit de Lord Steyne, qui se rend chez le père de Becky Sharp, un peintre de grand talent. C'est dans son atelier qu'on découvre l'héroïne du film, Becky Sharp, alors âgée de dix ans, qui marchande avec le noble aristocrate la vente du portrait de sa mère.

Cette scène permet de mieux comprendre l'attitude qu'elle aura par la suite vis-à-vis du protecteur de son père, et il est extrêmement intéressant de voir la caméra se focaliser pendant plusieurs minutes sur les pieds et les jambes de Lord Steyne, vêtu de soie, qui enjambe les enfants miséreux de ce quartier de Londres, et dont la cape traîne dans la boue.

D'emblée, on comprend que l''adaptation sera châtoyante, mais pas imbécile : le regard porté sur le Londres de cette époque est très lucide.

Reese Witherspoon, que je vois pour la première fois sur l'écran, est étonnante dans ce rôle d'une jeune fille extrêmement jolie, intelligente et manipulatrice. Le personnage qu'elle incarne a beau avoir des aspects déplaisants, je la trouve extrêmement sympathique : c'est une Lizzie Bennet qui aurait eu un parours différent au cours de son enfance, ce qui explique sa soif de revanche et son désir d'ascension sociale. Mira Nair la met magnifiquement en valeur par sa manière de filmer.

Les autres acteurs ne sont pas en reste, et on a le plaisir de retrouver des têtes bien connues :

- James Purefoy, qui incarnait Tom Bertram dans Mansfield Park 1999, et à qui le rôle du capitaine Rawdon, avec son physique avantageux et son côté roublard, convient assez bien ;


- la sympathique Romola Garai dans le rôle de la fadasse Amélia ;

- Rhys Ifan dans le rôle du capitaine Dobbin ;

- Jonathan Rhys Meyer dans le rôle de George Osborne, qui a tout du jeune coq, au sens propre comme au sens figuré ;

- un certain nombre de vieilles dames habituées des period dramas (on retrouve ainsi la Lady Catherine de Burgh d'Orgueil et Préjugés 1995 dans le rôle d'une aristocrate très très snob, mais aussi une actrice qui jouait le rôle d'une vieille fille dans l'adaptation du roman d'Elizabeth Gaskell, Femmes et Filles) ;

- l'acteur qui joue le rôle du professeur dans la dernière adaptation des Quatre filles du Docteur March, dans le rôle - ici abject - de Lord Steyne ;

et bien d'autres. On a l'impression d'être en pays de connaissance, et ma foi, c'est très agréable !

Sinon, l'adaptation est très colorée, sans pour autant tomber dans le ridicule, le mauvais goût ou le kitsch : c'est une adaptation qui caresse l'oeil sans l'agresser. Les costumes et les décors sont "indianisés", ce qui leur donne une touche décalée et moderne : non, nous ne sommes pas dans une énième adaptation en costumes compassée et poussiéreuse ; au contraire, le film montre la modernité du chef d'oeuvre de Thackeray, et en épousant le point de vue de l'une de ses héroïnes, Becky Sharp, adopte une posture résolument féministe.


L'Inde, pays dans lequel est né Thackeray, et auquel il fait plusieurs fois référence dans La Foire aux Vanités, est fréquemment convoquée par Mira Nair, qui en fait une voie d'accès à une forme de vie plus heureuse.

Bref, on rit, on est ému, et on passe un excellent moment. A voir !

3 commentaires:

  1. Chère Hôtesse,
    Voici donc un nouveau film qui va aller agrandir et faire pencher encore un peu plus dangereusement la pile de dvd pour laquelle nous n'avons pas encore trouvé de solution de rangement.
    Merci pour ces jolis mots sur Soyons-Suave qui, rédacteur ou rédactrice :), nous vont droit au coeur.

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  2. Vu il y a quelques mois et beaucoup aimé. Par contre, je n'ai pas (encore) lu le roman de Thackerey... C'est dans mes projets futurs :-)

    Penelope (Whoopsy)

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  3. Hello, Penelope ! :D

    C'est amusant, j'étais justement en train de me promener sur ton blog lorsque j'ai vu que tu avais posté un commentaire chez moi. ;)

    Cela nous fait un film en commun, alors !^^

    Je te conseille vivement le roman : c'est un pavé, mais qu'est-ce que c'est drôle ! ;)

    Si tu n'y vois pas d'inconvénient, je vais rajouter ton blog dans mes liens.

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