mercredi 19 janvier 2011

Poupoupidou, de Gérald Hustache-Mathieu (2011).

J'ai un emploi du temps extrêmement chargé ce mois de janvier (pour changer ^^), aussi mardi, j'ai profité de ma journée pour aller me détendre et me poser devant Poupoupidou, un film de Gérald Hustache-Mathieu, avec Jean-Paul Rouve et Sophie Quinton.

Je ne savais pas trop à quoi m'attendre, les critiques que j'avais lues étaient plutôt élogieuses, mais la bande-annonce ne m'avait pas complètement convaincue. Et pour finir, j'ai trouvé ce thriller qui se déroule à Mouthe, la ville la plus froide du Jura, extrêmement drôle, cocasse et original.

L'histoire ? Un écrivain de polars à la James Ellroy enquête sur le suicide d'une Miss Météo francomtoise qui avait tendance à s'identifier à Marilyn Monroe. Très vite, il suspecte un meurtre maquillé en suicide... Malgré le peu de moyens, le film est très bien filmé (tous les détails ont du sens) et surprend par un ton et un humour résolument originaux ; en outre, les comédiens sont excellents, y compris les seconds rôles, qu'il s'agisse de la tenancière de l'hôtel habillée en gothique, ou de la coiffeuse locale, toujours vêtue de manière exotique... c'est en outre un très beau portrait de femme qu'il nous est donné de découvrir là, avec une réflexion toujours d'actualité sur la soif de célébrité et ses désagréments.

On songe à Laura d'Otto Preminger, où un détective enquête sur une femme assassinée dont il tombe peu à peu amoureux ; on songe aussi à Boulevard du crépuscule, où c'est un mort qui raconte en voix off ce qui s'est passé ; et, bien sûr, les références à la vie, aux chansons, aux photographies et aux films de Marilyn sont là en filigrane, mais pas besoin de bien connaître l'actrice pour apprécier le film, qui est filmé de manière résolument contemporaine.

En bref, un film à la fois sombre, frais et léger (oui, tout ça à la fois !), et un réalisateur et des acteurs à suivre.

PS : Et la bande-son est vraiment géniale ! ;)

samedi 15 janvier 2011

Poussière, de Rosamond Lehmann.

La Première Guerre mondiale vient de s’achever. À l’issue des ses études à Cambridge, Judith Earle, jeune fille de 18 ans, regagne la grande maison familiale au bord de l’eau. Elle assiste au retour de ses voisins, les cousins Fyfe, qu’elle a idolâtrés tout au long de son enfance solitaire. Dans une mosaïque qui fait alterner passé et présent, le lecteur est témoin du douloureux apprentissage sentimental de Judith qui, tour à tour, à des moments différents de sa courte existence, est tombée amoureuse de chacun des cousins… pour finir irrémédiablement déçue.

J'ai fini de lire Poussière de Rosamond Lehmann il y a quelques semaines. Bilan des courses ? Je ne sais pas trop si j'ai aimé ce roman ou pas. Je crois quand même que je l'ai apprécié. A vrai dire, je ne connaissais pas du tout cet auteur, et je ne savais pas trop à quoi m'attendre...

Poussière met en scène une jeune fille, Judith, et ses altermoiements amoureux. Elevé dans une quasi solitude - elle ne découvrira la vie en collectivité que fort tard, à Cambridge, et ses relations avec ses parents, même si elle aime beaucoup son père, sont assez distantes (il n'en est pour ainsi dire presque pas question dans le roman, ou fort tardivement). Judith est fascinée depuis l'enfance par la famille Fyfe qui vient passer ses vacances dans la maison d'à côté : Charlie, Mariella, Martin, Julien et Roddy, qui sont tous plus ou moins frères et cousins. Tout cela se déroule au lendemain de la seconde guerre mondiale, à la campagne, dans un milieu aisé.

En fait, ce qui est intéressant dans ce roman, c'est moins l'intrigue que la façon dont Rosamund Lehmann se fait le peintre de l'âme humaine et d'une nature toujours en fleur. Enfin, peintre est un bien grand mot, étant donné qu'elle décrit des sensations toujours en mouvement, et ce avec une grâce et un talent remarquables. J'ai beaucoup aimé certaines scènes, en particulier celle des jeunes gens qui font du patin à glace au début de la Deuxième partie, je crois. J'ai également bien aimé la partie qui se déroule à Cambridge, qui m'a parue beaucoup plus vivante et m'a fait penser à Maurice d'E.M. Forster, ou encore ou début de Retour à Brideshead, d'Evelyn Waugh, deux romans qui décrivent la vie à l'université. Rosamund Lehmann en propose une version féminine cette fois.

Judith, le personnage principal, accorde sans doute trop d'importance à ces voisins occasionnels, et aux rêveries et fantasmes qu'ils suscitent en elle. Elle vit à travers le regard qu'ils portent sur elle, et pour eux plutôt que pour elle-même. Elle voudrait avoir autant d'importance à leurs yeux qu'eux en ont pour elle.

L'Histoire avec un grand H est curieusement absente du roman, même si la première guerre mondiale apparaît en filigrane (elle tue Charlie, le plus séduisant et les plus faible de la famille Fyfe, qui avait épousé Mariella avant la guerre, et qui a eu un enfant de lui, Peter ; elle affecte les nerfs de Julien, qui apparaît comme celui ayant la sensibilité la plus exacerbée). Le fait que Judith, une femme, puisse étudier, montre aussi l'évolution des moeurs.

L'amitié de Judith avec Jennifer est ambiguë, comme le montrera la fin du livre, mais Judith est d'une telle candeur, d'une telle innocence, qu'elle ne s'en rend pas compte, ou ne veut pas le voir. Elle est amoureuse de Roddy, qui apparaît comme quelqu'un d'assez désinvolte (le roman suggère qu'il est davatantage intéressé par un garçon de son âge, Tony). Quoique belle et intelligente, Judith est inexpérimentée, elle est amoureuse de la famille Fyfe et voudrait se l'approprier, c'est pourquoi elle se tournera tour à tour vers Roddy, le bon Martin, Julien, qui la feront souffrir et réciproquement, avant de recevoir plusieurs révélations ou confirmations grâce aux lettres de Julien, Mariella et Jennifer à la fin du livre. Une fin qui nous laisse une héroïne terriblement désillusionnée, mais aussi, d'une certaine manière, libérée de la tyrannie d'elle-même et des autres : à elle s'ouvrent enfin tous les possibles...

C'est un roman difficile à appréhender, parce que parfois insaisissable ; il porte malgré lui les traces de la sensibilité qui l'a vu naître - ces gens extrêmement raffinés et cultivés, ces descriptions de corps jeunes et beaux, ce goût pour pour la nature, les fleurs et l'eau font songer à la poésie et à la peinture symboliste, et à l'art nouveau ; cette analyse fine et précise de l'amour, de l'adolescence et de l'amitié, à certains passages de La Recherche - Rosamund Lehmann et Marcel Proust ont parfois la même prose lumineuse, comme impressionniste ; certaines de ses descriptions font d'ailleurs penser aux peintres de ce mouvement, tant par leurs thèmes (déjeuner sur l'herbe, promenade en barque, etc) que par la manière dont elles sont menées (d'une certaine manière, Rosamund Lehmann est un peintre des impressions, dont la nature est d'être changeantes).



Le projet de Rosamund Lehmann fait également songer à l'entreprise de ses contemporains, Virginia Woolf et consorts, qui s'efforçaient de décomposer les sensations et de remettre en cause les codes et conventions romanesques. Sauf que Rosamond Lehmann est beaucoup moins intellectualiste que Virginia Woolf, et c'est tant mieux - il faut dire que je ne suis pas une très grande fan de Virginia Woolf, dont les écrits m'obligent à beaucoup de concentration, et qui en général me fichent la migraine. Rosamund Lehmann est plutôt à l'image de ses deux héroïnes - Jennifer et Judith - à la fois sensible et sensuelle.

C'est un roman de débutante, qui s'inspire sans aucun doute de la vie intérieure de son auteur, avec des fautes de débutante (par moment, certains dialogues sont quand même hautement improbables, on pourrait presque croire que c'est Judith qui en invente les réponses, tant on ne voit pas les gens parler comme ça "dans la vraie vie"), des longueurs, l'absence d'une intrigue vraiment reserrée, mais écrit avec beaucoup de talent, indéniablement.

Une photographie de Rosamond Lehmann, de son frère et d'un ami de la famille (?) qui pourrait très bien servir d'illustration au roman :

Livre offert par Summerday dans le cadre du Secret Santa organisé sur Whoopsy Daisy, et recommandé par Emjy, dont voici le billet :

L'avis d'Emjy

mardi 11 janvier 2011

L'Affaire Cicéron, de Joseph Mankiewicz (1952).

Lorsque j'ai besoin d'un conseil cinéma, je vais sur le blog de mon ami Justin, alias le Cinéphile Stakhanoviste :

Chroniques du Cinéphile Stakhanoviste

Je suis tombée dessus complètement par hasard il y a de cela plusieurs mois en cherchant des informations sur le film Ulysse de Mario Camerini avec Kirk Douglas dans le rôle principal, et c'est le seul site qui en parlait de manière pertinente et approfondie.

Et de voir que c'est Ava Gardner dans le rôle de Pandora qui figurait et qui figure toujours sur la bannière de ce blog, je me suis dit : "Stakhanoviste ou pas, ce cinéphile ne peut qu'avoir bon goût". ;)

A partir de là, je me suis mis à fréquenter régulièrement ce blog, parce que j'y trouve toujours des idées de film à y piocher.

*

Quand j'étais petite (oui, attention, là, je vais un peu passer du coq à l'âne, mais vous verrez, je retombe toujours sur mes pattes) - quand, j'étais petite, donc, je n'allais pas souvent au cinéma, mes parents ayant été très refroidis par l'expérience ayant consisté à m'emmener voir Les aristochats : je n'y comprenais rien, et j'étais complètement terrifiée. Je n'étais pas une cinéphile précoce.

Par la suite, un peu plus grande, j'avais un frère plus âge qui se rendait fréquemment au cinéma qui se trouvait non loin de chez nous, et qui nous racontait toujours à table le film qu'il avait vu dans la semaine. Mon frère avait un vrai talent de conteur, et une vraie passion pour le cinéma qui l'a un un peu quitté depuis. Il tenait même à jour des carnets où il notait scrupuleusement les films qu'il avait vus, avec un certain nombre de renseignements factuels dessus (le genre de choses que je n'ai jamais eu le courage et la patience de faire).

Mon premier contact avec le cinéma passa donc d'abord par l'art du conteur, avant de devenir ensuite plus livresque : mon frère avait en effet beaucoup de livres sur le cinéma, et en empruntait souvent ; j'adorais les feuilleter pendant des heures, mémorisant ainsi des images, des noms et des résumés de films que je n'avais jamais vus.

C'est seulement devenue plus grande que je me suis mise à fréquenter les salles obscures avec assiduité, même si ces dernières années, l'arrivée du dvd a considérablement modifié mes habitudes de spectatrice.

Tout ça pour dire que comme beaucoup de gens, j'adore le cinéma, et tout particulièrement celui de l'âge d'or d'Hollywood (comment ça, ce billet commence à devenir vraiment verbeux ?^^). Et que j'adore James Mason et Gene Tierney, que j'ai découvert respectivement dans Pandora and the flying dutchman et Mrs Muir and the ghost, deux films réalisés complètement différemment, mais qui abordent un peu le même sujet.

Alors quand Justin m'a fait savoir sur son blog que les éditions Carlotta rééditaient trois films de Joseph Mankiewicz mettant en scène ces deux acteurs, je n'ai eu qu'un mot : "ce coffret, il me le faut !"

Et je n'ai pas regretté cette impulsion première.

L'affaire Cicéron (1952)

L'action du film de Mankiewicz se situe à Ankara, en Turquie, pendant la seconde guerre mondiale – une région officiellement neutre.





Première scène : l'ambassadeur d'Allemagne assiste à une réception au cours de laquelle une cantatrice chante un morceau de Wagner. Musique qui ennuie l'ambassadeur, si bien qu'il se dirige vers le buffet, où se trouve l'élégante comtesse Staviska, en train de manger avec un bel appétit. S'engage entre eux deux une conversation à fleuret moucheté où l'on comprend que la comtesse, une jeune et belle veuve très distinguée, a été obligée de fuir la Pologne à cause des Nazis ; elle n'a plus un sou et finit par demander à l'ambassadeur d'Allemagne s'il n'aurait pas besoin d'elle... en tant qu'espionne. L'ambassadeur refuse brutalement. Il se retire ; entre alors l'ambassadeur de Grande-Bretagne, et la réception poursuit son cours.

Deuxième scène : un homme (James Mason) s'introduit dans le bureau de Moyzisch, un sous fifre de l'ambassade d'Allemagne. Il est là pour vendre des photographies de documents de l'ambassade britannique classés top secret. Moyzisch accepte, après en avoir référé à ses supérieurs qui baptisent cet espion « Cicéron ». Cet espion amateur qui semble dominer la situation de main de maître n'est autre que Diello, le valet de chambre de l'ambassadeur de Grande-Bretagne.





Troisième scène : Diello se rend chez la comtesse Staviska dont il a été le serviteur autrefois, avant de se faire renvoyer. Il lui propose un marché : qu'elle achète une maison avec l'argent qu'il lui donne pour organiser des soirées mondaines où la diplomatie allemande pourra officiellement se rendre, ainsi elle couvrira ses activités, et pourront amasser suffisamment d'argent pour s'enfuir en Amérique du sud. La comtesse le gifle, mais accepte son marché...

Premier problème : les Anglais s'aperçoivent de certaines fuites et font appel à un enquêteur venu de Londres, pour élucider l'affaire.

Deuxième problème : la comtesse remplira-t-elle jusqu'au bout sa part du contrat ?


Cette histoire s'inspire de faits réels, et le film, qui par moments fait penser à du Lubitsch, à d'autres à du Hitchcock, dépasse le simple film d'espionnage pour explorer la relation de servilité qu'entretiennent les personnages, à un moment ou à un autre, vis-à-vis de leurs supérieurs. Dialogues et réalisation d'une extrême finesse, analyse psychologique subtile, suspense savamment entretenu, ce film est assurément l'un des meilleurs et des plus captivants de Mankiewicz, James Mason et Danielle Darrieux s'y montrant au sommet de leur art dramatique...

Mais naturellement, tout ça, le Cinéphile Stakhanoviste le dit beaucoup mieux que moi dans cet article...

L'affaire Cicéron - Five Fingers

Très prochainement, je compte bien évoquer les deux autres films de ce coffret, Le château du dragon et Chaînes conjugales. ;)

samedi 8 janvier 2011

Le livre des choses perdues, de John Connolly.

Toujours grâce au Secret Santa organisé sur Whoopsy Daisy et à Summerday, j'ai pu lire Le livre des choses perdues de John Connolly.



Le livre des choses perdues, c'est l'histoire de David, un jeune garçon britannique qui est amené à perdre sa mère durant le conflit, et qui vit très mal le remariage de sa mère six mois plus tard, et la naissance de son demi-frère, Georgie. David est très perturbé, il fait des cauchemars, il a des visions, il entend les livres lui parler... si bien que le jour où un avion s'écrase dans le jardin familial, c'est l'occasion pour lui de pénérter dans un nouveau monde, reflet de ses lectures et de ses peurs enfantines.

Un nouveau monde très inquiétant, avec des hommes loups assoiffés de sang, un Homme Biscornu, figure diabolique qui aime à tromper son monde, un animal monstrueux qui ressemble à une grosse chenille, une Forteresse aux Epines où vit une dangereuse sorcière... mais aussi des personnages qui viendront en aide à David : le Garde Forestier, qui ressemble étrangement à son père, les nains qui vivent avec Blanche-Neige - épisode qui donne lieu à une réécriture hilarante, puisque celle-ci est une créature monstrueuse qui mange tout sur son passage ; les nains ont cherché à l'empoisonner à l'aide d'une pomme ; jugés devant un tribunal, ils sont obligés de la garder à demeure et se sont depuis convertis aux idéaux du communisme... - , le chevalier Roland, parti en quête de savoir ce qu'est devenu son ami Raphaël, et Anna, la petite fille qui disparut un jour avec Jonathan Tulvey.

C'est très bien écrit, mais aussi très sanglant - ça égorge, ça éviscère, ça découpe... C'est un livre qui fait plutôt peur, parce qu'il joue sur nos peurs enfantines, utilise la matière très riche et très sombre des contes de fées - de ce point de vue, la réécritture de certains contes de fées est brillante, et en les lisant, j'ai repensé au personnage de la vieille femme écrivain dans Le 13ème conte de Diane Setterfield, qui a entrepris elle aussi de réécrire certains contes en les modernisant, un livre qui m'avait déçu mais dont les thèmes étaient intéressants. La réutilisation des contes est plutôt gore et réservé aux adultes, mais ce traitement vient rappeler la violence originelle de ces écrits qui aident à grandir - or, c'est précisément le but secret assigné aux épreuves initiatiques que doit surmonter David ; chaque fois qu'il vainct un monstre, il remporte une victoire sur ses propres peurs, ce qui l'aidera à mûrir et à mieux vivre la situation familiale douloureuse qui était la sienne avant de s'embarquer dans ce monde "autre".

Un livre riche et intéressant où la mièvrerie est totalement absente, que je ne relirai pas forcément, mais qui met subtilement en avant la puissance évocatoire des contes et des conteurs, qui nous aident tous à mieux vivre.

Pas très envie d'une adaptation cinématographique qui risquerait de tout édulcorer, mais qu'un illustrateur de talent, comme Benjamin Lacombe ou d'autres, s'empare de ce texte, ça, oui !

mercredi 5 janvier 2011

Snobs, de Julian Fellowes.


Dans le cadre du Secret Santa organisé sur Whoopsy Daisy, j'ai reçu un certain nombre d'ouvrages de Summerday que je me suis empressée de découvrir pendant les vacances. Le premier d'entre eux est Snobs, de Julian Fellowes.



Ce livre est une féroce et cruelle satire de l'aristocratie anglaise, et de ceux qui ne rêvent que d'une chose, en faire partie.

La particularité de ce roman, c'est que l'action se situe à notre époque, même si la société qui y est décrite a conservé, par bien des aspects, les moeurs des siècles passés.

Bien qu'ils présentent des aspects fort antipathiques, on s'attache aux deux personnages principaux, Edith Lavery, une jeune roturière pleine d'ambition, dont la mère a trop lu les romans de Barbara Cartland, et au narrateur, dont on découvre peu à peu qu'il appartient à ce milieu aristocratique, tout en exerçant la profession de comédien dans des séries télévisées de second ordre.

Edith Lavery fait tout pour épouser le comte Charles Broughton, qui n'a rien d'extraordinaire, si ce n'est son titre, sa position sociale et sa richesse. D'abord aux anges, Edith ne tarde pas à s'ennuyer, entre les interminables parties de chasse, les thés de bienfaisance chapeautés par sa belle-mère, Googie, et son mari, dont la conversation est aussi terne que ses prouesses sexuelles ; c'est pourquoi elle ne tarde pas à s'enticher de Simon Russel, un acteur de seconde zone, extrêmement beau, mais aussi extraordinairement peu futé...

L'analyse sociale est très fine, et percutante. On pense beaucoup à Madame Bovary de Flaubert dans la manière dont l'héroïne est décrite (comme Emma, Edith ira d'illusions en désillusions) et à La Recherche de Proust, qui adorait épingler le snobisme de ses contemporains. L'intrigue du livre m'a aussi par moment fait penser aux Boucanières d'Edith Wharton, qui aborde des thèmes similaires.

En revanche, même si c'est très bien écrit, je ne placerai pas le livre de Julian Fellowes au même niveau, même si je ne saurai pas trop expliquer pourquoi.

Peut-être parce que le style m'a davantage fait penser aux moralistes du XVIIème siècle (c'est écrit dans un style très classique, même s'il y a des références à des choses très contemporaines) : du coup, ça a un petit quelque chose de sec qui n'est pas pour me déplaire, mais le livre n'a pas l'ampleur des romans fleuves du XIXème siècle.

Peut-être aussi parce que les scènes de sexe, relativement explicites et réalistes ancrent ce livre dans quelque chose de contemporain (dans un livre plus ancien, l'auteur aurait procédé par allusion, mais n'aurait pas décrit ces scènes intimes) : à ce propos, je trouve que les Anglais, lorsqu'ils décrivent ce type de scènes, sont assez crus et cliniques (je pense à la scène de la bibliothèque dans Expiation de Ian MacEwan, ou à son roman plus récent sur le mariage dont j'ai oublié le titre) et pas du tout poétiques.

Bref, un roman captivant, qui m'a fait songer au travail de Posy Simmonds qui a elle aussi proposé une réécriture de Madame Bovary auquel le roman de Julian Fellowes peut faire penser, par bien des aspects (mais la fin de Snobs est assez différente de celle proposée par Flaubert).


... and a happy new year !

Avec un peu de retard, désolée ! ;)