lundi 19 juillet 2010

Les Boucanières, d'Edith Wharton.

J'ai fini de lire Les Boucanières la semaine dernière, et même si la fin du livre a suscité en moi quelques réserves, cette lecture m'a enchantée quasiment de bout en bout.



A force de pratiquer un auteur, une sorte de familiarité s'instaure entre lui et le lecteur, qui a l'impression de mieux le connaître, et c'est exactement ce qui s'est passé entre l'auteur des Boucanières et moi.

Ce roman est le dernier écrit par Edith Wharton ; elle y travaillait encore lorsqu'elle décéda en 1937. On publia la version incomplète en 1838, avant que Marion Mainwaring ne se serve des notes et du synopsis de l'auteur pour achever cette oeuvre.

L'oeuvre en question est une fresque se déroulant sur plusieurs années. On suit le destin de jeunes filles issues de familles aisées :

-Conchita Closson, fille d'un divorcé, planteur de café au Brésil, qui se poudre à dix-sept ans, fume des cigarettes en faisant des ronds et promène un caniche cravaté d'un noeud rouge ;

- les deux soeurs Elmsworth ;

- la belle Virginia St. George, et sa soeur cadette, Nan.

Ces Américaines, dont les parents sont devenus riches grâce à Wall Street et à l'industrie américaine, cherchent, à la manière des pirates - d'où le titre - à prendre d'assaut la bonne société américaine, qui se méfie de ces jeunes filles au pedigree douteux.

En désespoir de cause, leur mère, pour leur donner un vernis de respectabilité, les flanque d'une gouvernante anglaise, Miss Testvalley ; or, celle-ci, d'origine italienne, nièce de Dante Gabriel Rossetti, célèbre peintre préraphaëlite, est très intelligente et possède une personnalité exceptionnelle, avec laquelle Nan, la plus jeune fille des St. George, se sent en affinité.

C'est cette gouvernante, parce qu'elle a travaillé pour de grandes familles de l'aristocratie anglaise, qui convaincra les jeunes filles et leurs mères de se rendre en Angleterre pour y chercher un bon parti, ce qu'elles trouveront.

Mais ces mariages d'argent mèneront-ils nos héroïnes au bonheur ?

Avec une plume particulièrement aiguisée, un humour acerbe et plus de tendresse pour ses personnages qu'à l'accoutumée, Edith Wharton réussit l'un de ses meilleurs romans. Les intrigues mises en place par les jeunes filles pour conquérir un mari sont savoureuses, la plus grande liberté de parole des Américaines les rendant d'autant plus séduisantes aux yeux des Anglais, qui vivent dans une société encore très corsetée. Nan et sa gouvernante se révèlent les personnages les plus attachants du livre. Les personnages masculins ne sont pas en reste, même si beaucoup d'entre eux se révèlent particulièrement veules.

Bien qu'étant le dernier roman d'Edith Wharton, celui-ci se révèle résolument optimiste.

Cependant - et c'est le seul bémol à mon enthousiasme : on sent que la fin n'a pas été rédigée par Edith Wharton, car le style en est très très faible (limite roman Harlequin). Le fossé entre le style déployé par Edith Wharton dans les quatre premières parties et la dernière, heureusement plus courte, fait du coup mieux apprécier l'importance de sa manière d'écrire, qui confère à ses romans leur qualité littéraire.


A noter, la réédition récente de ce livre chez Points :



Et l'adaptation de la BBC :

samedi 10 juillet 2010

Chez les heureux du monde, d'Edith Wharton.

J'ai fini de lire, il y a quelques jours déjà, Chez les heureux du monde d'Edith Wharton, et j'ai été absolument conquise par le style de l'auteur et l'intelligence de son roman !

Voici comment se présente la couverture de mon édition :

Je trouve ce tableau de John Dawson Watson très beau (le velours de la sortie de bal de cette femme à l'éventail est extrêmement bien rendu) : il convient à merveille pour illustrer ce roman, dont la figure centrale, Miss Lily Bart, est une jeune orpheline ruinée, qui aimerait faire un riche mariage. Un après-midi de septembre, à la gare de New York, alors qu'elle vient de manquer le train qui devait la conduire chez des amis, elle rencontre par hasard Mr Selden, et accepte de venir prendre une tasse de thé chez ce jeune avocat. C’est l’occasion pour lui de lui faire une cour discrète ; mais pour elle, ce moment passé seule à seul chez un célibataire est aussi la première entorse aux usages du monde.

Publié en 1905, Chez les heureux du monde ("The House of mirth", c'est-à-dire en français "La Maison de liesse", titre tiré d’un passage de l’Ecclésiaste) décrit avec beaucoup d'acuité la haute société new-yorkaise, où le paraître, l'argent et la corruption des moeurs règnent en maîtres. C'est dans ce milieu qu'évolue la belle Lily Bart, qui fait l'objet d'un portrait d'une grande finesse finesse psychologique : d'abord présentée comme une arriviste prête à tout pour épouser un héritier susceptible de lui offrir la vie luxueuse et futile à laquelle elle aspire, le portrait de la jeune fille se nuancera pour devenir finalement un personnage très humain et très proche du lecteur.

On ne s'ennuie jamais à la lecture de ce roman très bien écrit qui comporte quelques moments de suspense, des dialogues brillants, et une galerie de personnages secondaires extrêmement variés et intéressants. On pense par moment à Balzac, à Flaubert et à Zola, mais Edith Wharton se démarque de ces écrivains en fondant son intrigue sur le thème du mariage et de l'ascension sociale qu'il permet : sa critique ironique et amère conserve toute son actualité.

A noter qu'il existe une adaptation cinématographique de ce roman avec Gillian Anderson :



Apparemment, toute une série d'adaptations cinématographiques et télévisées des romans d'Edith Wharton ont vu le jour dans les années 1990, l'impulsion ayant peut-être été donnée par le film de Martin Scorsese, Le Temps de l'Innocence (1993), adaptation très réussie du roman du même nom.

Sur ce film, généralement considéré comme un OVNI au sein de la production scorsesienne, un critique de cinéma a pu écrire :

"Le Temps de l'Innocence dessine une dialectique de l'aristocratie : comment faire voir sans montrer, comment dire les choses sans les nommer... La Mafia et l'aristocratie, c'est finalement le même univers clos, régi par des règles, des codes."

Cet engouement pour un auteur au moins aussi critique sur la société américaine que F.S. Fitzgerald, qu'Edith Wharton fut d'ailleurs amenée à rencontrer, témoigne, de la part des pays de langue anglo-saxonne, d'un tout autre rapport à la littérature que celui entretenu par les Français.

Lily Bart (Gillian Anderson) chez Lawrence Selden.

vendredi 9 juillet 2010

Tendre est la nuit, de Francis Scott Fitzgerald.

Toujours dans le cadre du Challenge Classiques Anglophones, un livre lu peu de temps après Cranford d'Elizabeth Gaskell :


Tendre est la nuit
, rédigé peu de temps après Gatsby le Magnifique, doit son titre à poème de Keats, "Ode à un rossignol", qui figure en exergue du roman.

Ce livre trouve sa source d'inspiration dans la vie de son auteur, qu'il s'agisse du séjour de ce dernier à Hollywood en tant qu'artiste, de la première dépression de Zelda qui dut être hospitalisée en Suisse (lieu où se déroule une partie du roman), ou la mort de son père.

Pendant plus abouti, peut-être, de Gatsby le Magnifique, Tendre est la nuit dresse le portrait de la jet set américaine des années 1920, celle des actrices, grand médecin ou riches héritières qui passent leur temps dans les plus prestigieux hôtels d'Europe, dans les capitales ou les luxueuses stations balnéaires.

Parmi eux, Rosemary Hoyt, une jeune starlette, qui tombe rapidement sous le charme du très charismatique Dick Diver, marié à la très belle, très riche et très oisive Nicole Diver, mais peu à peu, l'on découvre que ce monde n'est que carton pâte, et que le couple parfait formé par les Diver n'est pas si lisse qu'on aurait pu le penser.

Beaucoup de poésie et de symbolisme dans ce récit riche en surprises, aux descriptions tantôt nettes, tantôt floues... et qui n'a pas volé sa réputation de chef d'oeuvre !

mardi 6 juillet 2010

Frasier : "Good night Seattle, we love you !"

J'écris ce billet pour parler d'une série télévisée que j'ai redécouverte avec bonheur et que j'adore littéralement : Frasier !

Frasier est une sitcom créée par David Angell, Peter Casey et David Lee et diffusée entre 1993 et 2004 aux Etats-Unis. Dérivée de Cheers, cette série a connu un immense succès outre Atlantique et remporté de nombreuses récompenses, notamment le plus grand nombre d'Emmy Awards parmi toutes les séries jamais diffusées.

En France, la série a été diffusée sur deux chaînes privées : Série Club et Paris Première ; c'est d'ailleurs grâce à cette dernière chaîne que j'ai pu visionner quelques épisodes il y a dix ans. Déjà à l'époque, j'avais été vite conquise par la drôlerie et la finesse de cette sitcom, dont j'avais gardé le nom en tête, bien décidée à me procurer un jour les épisodes en dvd.

C'est maintenant chose faite !

Le synopsis est le suivant :

Fraîchement divorcé de sa femme Lilith (sic), le Dr Frasier Crane (Kelsey Grammer) quitte Boston pour retourner dans sa ville natale, Seattle. Psychiâtre, il devient l'animateur d'une émission de radio où il reçoit les appels d'auditeurs ayant des difficultés et leur donne ses conseils en direct. Mais si Frasier est assez doué pour résoudre les problèmes de ses auditeurs perturbés, il en va tout autrement dans sa vie privée !

Obligé de recueillir chez lui Marty (John Mahoney), son père, un policier à la retraite, blessé à la jambe par une balle, il a bien du mal à établir des rapports harmonieux avec un géniteur qui cuturellemnr préfère son chien Eddie (Moose), les matchs de foot et les hamburgers frites aux vins fins et aux loisirs bourgeois de son thérapeute de fils.

Heureusement, Daphnée (Jane leeves), l'aide-soignante anglaise, est là pour apaiser les conflits ; elle est d'ailleurs un peu voyante extra-lucide à ses heures... Et Nils (David Hyde Pierce, excellent), le frère de Frasier, lui-même thérapeute, maniaque et coincé, mais médiatiquement moins célèbre, est loin de rester complètement insensible à son charme, alors qu'il est marié à la riche Maris, que les créateurs de la série ont renoncé à faire incarner par une actrice, tellement elle est perçue comme complètement déjantée par l'entourage de Nils.

Enfin, pour compléter cette fine équipe, n'oublions pas Roz (Peri Gilpin), la productrice de l'émission de Frasier, une croqueuse d'hommes qui enchaîne les aventures sans lendemain, et Bob "Bulldog" Briscoe, l'animateur complètement allumé de l'émission sportive de KACL...

Pour l'instant, j'ai vu les épisodes des saisons 1, 2, 3 et 4, qui sont tout simplement à mourir de rire ! Ce que j'aime dans cette série ? L'intelligence du scénario, la qualité du jeu des comédiens, la finesse des répliques et des situations, tant familiales que professionnelles. Frasier, c'est un cocktail réussi d'émotion et d'humour ! Le seul défaut de cette sitcom : les rires enregistrés des spectateurs qui assistaient au tournage, défaut qu'on oublie assez vite. Sa qualité (outre celles déjà mentionnées) : une VF tout à fait supportable.

Le générique, qui subit un certain nombre de variations au fur et à mesure que la série évolue :



Bref : un bijou à découvrir de toute urgence.

Cranford, d'Elizabeth Gaskell.

Dans le cadre du Challenge Classiques Anglophones organisé par Whoopsy Daisy, voici la présentation d'un roman lu il y a quelques temps déjà, paru aux éditions de L'Herne en décembre 2009 :


C'est le troisième roman d'Elizabeth Gaskell que je découvre, après Nord et Sud et Femmes et Filles. Contrairement aux deux romans précédents, il n'y a pas vraiment d'intrigue suivie : on a plutôt affaire à une succession d'anecdotes qui tournent autour des habitant(e)s du petit village de Cranford, anecdotes que la narratrice rapporte avec beaucoup d'humour. Pour paraphraser un critique, chaque chapitre du roman est une piquante chronique détaillant avec humour et gentillesse les petits riens qui font le quotidien des villageois. Les menus événements - achat d’une nouvelle robe, préparatifs scrupuleux pour une soirée entre amies, lecture de lettres anciennes retrouvées des années plus tard… – sont racontés par une narratrice à la fois observatrice et complice : une jeune fille sentimentale mais futée qui ne s'en laisse pas compter, et qui fait preuve d'une grande bienveillance, notamment pour sa vieille amie, Miss Matty, demoiselle vulnérable et naïve, un peu ridicule à force d'avoir été maintenue sous la férule d’une sœur rigide et autoritaire. Matty révélera pourtant, aux heures grises, une âme noble et courageuse, presque héroïque...

J'ai lu ce livre petit à petit, avec beaucoup de plaisir ; j'aime beaucoup la manière doucement ironique dont l'auteur moque les petits travers de la société de Cranford, et en particulier le snobisme des personnes de la bonne société. Certains passages ont un caractère un peu édifiant, mais on est chez Elizabeth Gaskell, que j'ai toujours un peu vue comme une Comtesse de Ségur socialiste qui écrirait pour les adultes. Une jolie découverte, en somme.

A noter que Cranford a fait l'objet d'une adaptation télévisée britannique un peu particulière, puisqu'elle mêle trois romans écrits par Elizabeth Gaskell : Cranford, My Lady Ludlow, et Mr Harrison's Confessions. La série a été diffusée en 5 épisodes au Royaume Uni en novembre et décembre 2007, et deux nouveaux épisodes ont vu le jour fin 2009 sur BBC ONE :



Vous trouverez un bon compte-rendu de cette série que je n'ai pas encore vue sur ce blog :

http://chroniques-d-isil.over-blog.com/article-16935813.html

lundi 5 juillet 2010

Cheers, where everibody knows your name...

Cela fait un moment que j'aimerais vous présenter cette série télévisée américaine que j'ai découverte il y a quelques mois et que j'aime beaucoup : Cheers.

Cheers est une sitcom créée dans les années 1980 par Les Charles, Glen Charles et James Burrows et qui passait sur NBC. La série a remporté un très grand succès, puisqu'elle a perduré 11 ans et remporté un nombre considérable de prix.


Cheers fait référence à une expression anglaise courante utilisée pour porter un toast, mais c'est aussi, dans la série, le nom d'un bar situé à Boston, et tenu par Sam Malone (Ted Danson), un ancien joueur de base ball. Les amis, des habitués viennent pour y parler de la vie, de futilités, ou des aventures amoureuses de Sam, le patron... Un jour, Diane Chambers (Shelley Long), débarque dans ce lieu avec un professeur d'université plus âgé qu'elle : elle est son assistante, et il doit l'épouser, mais il aime encore son ex-femme... une série de malentendus fera que Diane se retrouvera plaquée et virée à la fin de l'épisode... bien que ne disposant d'aucune qualification, elle se retrouve engagée comme serveuse de bar par Sam.

Voici le générique de la série :



La série repose sur des personnages particulièrement hauts en couleur : Sam (Ted Malone), un ancien joueur de base-ball alcoolique qui a réussi à surmonter ses problèmes d'alcool ; Diane (Shelley Longer), une jeune femme très jolie et très cultivée, qui doit s'adapter à un milieu qui n'est pas le sien ; Carla Tortelli (Rhea Perlman), la serveuse italienne forte en gueule et affligée de gosses parfaitement insupportables ; Ernie Pantuso (Nicholas Colasanto), l'ancien coach de Sam, qui souffre parfois de confusion mentale ; Norm Petersen (George Wendt), le comptable qui trouve dans ce bar et dans la bière un refuge à un quotidien conjugal et professionnel pas toujours très épanouissant ; Cliff Clavin (John Ratzenberg), le facteur aux théories scientifiques qui valent leur pesant de cacahouètes...


Les répliques fusent, les situations sont drôles originales et bien trouvées, et la guerre des classes et des sexes n'est pas en reste, puisque l'un des principaux intérêts de la première saison réside dans l'attirance que Sam et Diane éprouvent l'un pour l'autre, alors que tout les oppose...


Bref, une série que je recommande chaudement !

A noter que c'est de Cheers que dérive Frasier, une autre série également drôlissime.