L'Autre Dumas est un bon film, porté par un scénario solide - qui s'inspire d'une pièce créée en 2003, Signé Dumas - et des comédiens talentueux, Safy Nebbou filmant le tout avec un esprit résolument contemporain, évitant ainsi de sombrer dans le piège de l'académisme qui menace toujours de plomber les films en costumes.
L'Autre Dumas repose sur la confrontation de deux personnages à la fois complètement différents et profondément liés et complémentaires : Alexandre Dumas, l'écrivain qui vit en pleine lumière, et son "nègre", Auguste Maquet, qui vit dans l'ombre du grand homme auquel il est pourtant nécessaire.
Comme l'explique le réalisateur : "L'un, Maquet, a tout du gratte-papier laborieux et besogneux, il se consume de l'intérieur. L'autre, Dumas, a le génie de mettre en place ses textes et ses idées, il crée avec facilité et dans le plaisir, comme le montre la scène où ses feuillets s'envolent dans les dunes. Comment vit-on dans l'ombre d'un grand homme ? Comment fait-on pour trouver sa place ? Le drame intime de Maquet c'est son admiration sans bornes pour Dumas et chacun sait que l'admiration, quand elle va jusqu'au mimétisme, jusqu'à la perte de soi, est un mélange explosif d'amour et de haine. [...] J'aime à penser qu'il s'est passé quelque chose de fort entre ces deux-là. [...] Auguste Maquet est une force créatrice pour Alexandre Dumas. Sans lui il désespère et n'arrive plus à écrire, comme dans cette scène où Maquet a disparu depuis trois jours et où Dumas fait le constat de son impuissance. Le génie foisonnant de Dumas a besoin de la rigueur méthodique de Maquet".
Ces deux personnages sont interprétés avec talent par Benoît Poelvoorde et Gérard Dépardieu, à qui le rôle va comme un gant. Tous deux sont remarquables (avec une préférence peut-être pour Benoît Poelvoorde).
Une attention particulière a été portée aux rôles féminins, et j'ai beaucoup aimé Dominique Blanc dans le rôle de la secrétaire et maîtresse de Dumas, ainsi que Catherine Mouchet dans le rôle de l'épouse d'Auguste Maquet. Mélanie Thierry est très bien, mais j'ai moins aimé son rôle, ainsi que tout ce qui a trait à la révolution de 1848, la partie la plus faible du film à mon avis.
Le film baigne dans une atmosphère de douce fantaisie, et se révèle tout à fait passionnant lorsqu'il explore les relations entre Alexandre Dumas et Auguste Maquet, entre comédie et tragédie intime.
D'après ce que j'ai pu glaner ici ou là sur Internet, Safy Nebbou s'est inspiré de plusieurs sources et univers artistiques pour bâtir l'univers de L'autre Dumas. Il s'est d'abord et avant tout inspiré, selon ses propres termes, du cinéma anglo-saxon : Les Liaisons dangereuses, de Stephen Frears ; Le Temps de l'innocence de Martin Scorsese, ainsi que la mini-série britannique Elizabeth I réalisée par Tom Hooper en 2005, qui retrace la vie privée de la reine d'Angleterre Elisabeth I. Du côté des influences françaises, il faut chercher "des films qui ont dépassé l'époque" : La Reine Margot de Patrice Chéreau ou Saint-Cyr de Patricia Mazuy. Du côté de la peinture, Safy Nebbou revendique une influence importante des peintres Vermeer, Rembrandt et Delacroix (c'est flagrant pour tout ce qui a trait à l'épisode révolutionnaire de 1848)... Sans oublier pour finir de nombreuses biographies historiques consacrées à Alexandre Dumas Père, dont celle écrite par l'historien Henri Troyat, Les Trois Dumas, un ouvrage que j'ai lu il y a longtemps et que j'avais trouvé tout à fait passionnant.
Bref, un très joli petit film, que je recommande à tous.
Il faudrait que je prenne également le taureau par les cornes en ce qui concerne ma pile de DVD. Je ne regarde que des DVD empruntés et néglige ceux que j'ai achetés.
RépondreSupprimerEntre parenthèse, j'aimerais beaucoup voir "L'autre Dumas", notamment pour la confrontation des deux acteurs principaux.
Merci, Julien, pour ton commentaire. ;)
RépondreSupprimerC'est surtout la confrontation entre Depardieu et Poelvoorde qui est intéressante ; Poelvoorde est tout en retenue, c'est très intéressant. Et ça fait du bien de voir enfin Dominique Blanc dans un rôle plus "léger" ! :D
Sinon, la hauteur de ma pile de dvds est effrayante, elle aussi ; j'ai décidé de ne plus en acheter tant que je n'aurais pas visionné ceux que je dois voir : dans le lot, pas mal d'adaptations de Dumas, des classiques anglais, et un certain nombre de peplums.
En plus, pour des raisons techniques, je ne peux regarder des dvds que le week-end, alors le moins qu'on puisse dire, c'est que ça n'avance pas très vite !^^
Les pile de dvd qui s'accumulent notre drame à tous ^^
RépondreSupprimerSinon bien tenté par "L'Autre Dumas" que j'avais raté en salle toujours plaisant ces fictions plus ou moins romancées autour d'écrivains fameux comme "Jane" dans un autre registre par exemple. A la sortie il y avait eu une pseudo polémique à cause du choix de Depardieu ne représentant pas les origines mulatre de Dumas...
Ce type de "biopics" a eu tendance à se multiplier ces dernières années ; en général, c'est fait intelligemment et c'est agréable à regarder.
RépondreSupprimerJe n'avais pas trop aimé l'un des premiers d'entre eux, "Shakespeare in love", mais "Becoming Jane" de Julian Jarrold m'a conquise au moment de sa sortie ; sur Jane Austen, il existe d'ailleurs un téléfilm complémentaire sur la fin de sa vie réalisé par la BBC : "Miss Austen Regrets" - c'est la merveilleuse et trop rare Olivia Williams qui incarne le rôle titre. Sinon, il y a le "Molière" de Laurent Tirard que j'aime beaucoup ;)
Quant à la polémique sur le choix de Gérard Depardieu pour ce film, je l'ai trouvée moi aussi assez vaine...
Très sympa "Molière" effectivement, vu il y a longtemps mais plutôt bien aimé "Shakespeare in love" (même tout ces oscars à la barbe du "Soldat Ryan" de Spielberg" reste un mystère) d'ailleurs du coup après des découvertes littéraires récentes ;-) je serai bien curieux de voir "Les Soeurs Brontë" de Téchiné bien que je ne soit pas grand amateur de son cinéma.
RépondreSupprimerPour ce qui est de "Shakespeare in love", c'est assez subjectif ; je n'ai pas aimé la prestation de Gwyneth Paltrow... pourtant, je la trouve très jolie et sympathique, mais chaque fois que je la vois jouer, je trouve qu'il lui manque un petit quelque chose qui donnerait de l'âme à ce qu'elle fait.
RépondreSupprimerQuant au film de Téchiné, mea culpa : je me suis laissé dire qu'il était atrocement ennuyeux, alors j'ai retardé l'achat de ce film... Trois actrices de renom, quand même. ;)
Moi aussi je m'étais juré de ne plus acheter de DVD. J'ai été à la FNAC aujourd'hui et ... "Indiscrétions", "La colline des potences", "un américain à New-York", "l'extravagant Mr Deeds" et "un homme est passé" ... je ne dis que ça, je n'ai pas pu me retenir :))
RépondreSupprimerLa FNAC est un lieu de perdition, c'est bien connu ! ;)
RépondreSupprimerChère mademoiselle Popila, je découvre aujourd'hui que Soyons-Suave figure parmi vos favoris... Emotions... Je vous en remercie sincèrement. Je réfléchis dores et déjà à une solution pour éviter les DVD qui s'entassent. C'est la moindre des choses. Dès que j'ai trouvé la piste d'une idée, je reviens vers vous aussitôt... même si je sais que je vais rester un peu traîner sur vos fines pages...
RépondreSupprimerChère et talentueuse rédactrice de Soyons-Suave,
RépondreSupprimerJe suis donc démasquée...
Oui, je l'avoue, cela fait plusieurs semaines que je viens en catimini feuilletter les doux billets de votre blog, postés avec une fréquence et une régularité qui forcent l'admiration.
Car maintenant que je vous ai découverte, que serait ma semaine sans la pause nicotine de Lauren Bacall, vos exquis conseils capillaires, et le quiz de la semaine, dans lequel j'espère briller un jour ?
Soyez remerciée pour avoir bien voulu prendre la peine de poster un message ici, et aussi d'avoir spontanément proposé de consacrer un peu de votre précieux temps pour réfléchir à cette question qui tarraude les cinéphiles depuis l'invention du dvd : que faire quand la pile de ceux qu'il nous reste à voir menace dangereusement de s'écrouler ?
Nul doute que Soyons-Suave, comme toujours, saura trouver la solution.
Bien à vous,
Popila.
PS : J'ai toujours supposé que vous étiez une rédactrice, mais si tel n'était pas le cas, je vous présente naturellement mes excuses... les plus suaves.