dimanche 25 décembre 2011

Je sais que ce blog est désert depuis des semaines...

... mais je voulais quand même vous souhaiter un très joyeux Noël !!!


Du nouveau concernant mes prochaines lectures très vite ! ;)

vendredi 23 décembre 2011

New York, New York, de Martin Scorsese (1977).

Vu New York, New York de Martin Scorsese, avec Robert de Niro et Liza Minelli, un film sur la rencontre entre un saxophoniste virtuose et une chanteuse et danseuse très douée dans les années 1940... j'ai beaucoup aimé ; Robert de Niro a un jeu très intense ; Liza Minelli donne le meilleur d'elle-même. C'est filmé par un grand réalisateur, et certaines scènes sont extrêmement drôles, parfois déjantées, émouvantes souvent.

Bien sûr, la musique joue un rôle très important dans le film. Les morceaux chantés par Liza à ses débuts sont parfois sirupeux, mais au fur et à mesure que sa carrière se construit, elle en vient à interpréter des chansons plus originales et personnelles. Et la dernière scène est mythique.

vendredi 9 décembre 2011

Rien n'est trop beau, de Rona Jaffe (1958).

Dans le New-York des années cinquante, cinq femmes d'horizons différents, secrétaires dans une maison d'édition, aspirent à un avenir heureux et cherchent leur place au soleil dans une société dominée par les hommes. Si l'une ambitionne d'être directrice éditoriale, l'autre rêve secrètement d'être chanteuse, et à la troisième seul importe un mariage réussi...A travers le portrait croisé de ces cinq héroines, c'est toute une société et toute une époque qui renaîssent sous la plume talentueuse de Ronna Jaffe, époque à laquelle le mariage était, pour les femmes, un sésame indispensable ...Publié en 1958 aux Etats-Unis, ce premier roman qui n'a pas pris une ride rend un très bel hommage aux femmes, dans une atmosphère rétro pleine de charme, clin d'oeil à la série Madmen.

J'ai lu ce roman début novembre, et j'ai beaucoup aimé cet ouvrage de Rona Jaffe publié en 1958.

J'ai été d'abord un peu déconcertée par le début, car la romancière prend le temps de poser ses personnages (ce qui ne veut pas dire que cela soit ennuyeux, bien au contraire, mais je m'attendais à un roman plus dynamique et plus enlevé). Cinq héroïnes très différentes les unes des autres, âgées à peu près d'une vingtaine d'années, font leur entrée dans une maison d'édition. Elles vont être amenées à faire des choix amoureux et professionnels très différents, puisque l'une fera un mariage classique traditionnel, arrêtant alors de travailler pour avoir des enfants ; la seconde, comédienne travaillant comme secrétaire pour combler des fins de mois difficiles, s'amourachera d'un producteur ; la troisième tombera amoureuse d'un fils de famille qui la laissera froidement tomber ; la quatrième, fraîchement divorcée et mère, réussira à refaire sa vie ; et enfin la dernière finira par privilégier sa carrière, se révélant incapable, après des fiançailles rompues, de renouer avec les conventions qui régissent la vie d'un couple dans les années 1950-1960.

Sans que ce soit un coup de coeur (ceci dit, c'est difficile pour moi en ce moment de passer à autre chose après La couleur des sentiments, et Rien n'est trop beau a quand même su me captiver), j'ai trouvé l'intrigue très fluide, jamais ennuyeuse. Les personnages féminins et masculins sont très crédibles et attachants. C'est une fiction qui n'est jamais artificielle ; le New-York mythique de ces années là, tel qu'on peut le découvrir dans des films de Billy Wilder comme Sept ans de réflexion et La garçonnière, est bien restitué, et les problèmes de ces femmes (comment conjuguer le modèle conjugal traditionnel et la vie professionnelle) gardent toute leur actualité. La réflexion de l'auteur est fine (aucun modèle n'est montré comme étant supérieur aux autres ; certaines femmes suivent un parcours très conventionnel, d'autres s'efforcent de s'engager dans une autre voie, non sans mal) et son style, bon : c'est simple, mais bien écrit ; les scènes d'amour sont dépeintes avec beaucoup de pudeur, et ce roman n'exclut pas quelques touches d'humour.

Bref, je le conseille à tous ceux qui s'intéressent au New-York des années 1950-60 et à la condition féminine.

vendredi 11 novembre 2011

La couleur des sentiments, de Kathryn Stockett.

Chez les Blancs de Jackson, Mississippi, ce sont les Noires qui font le ménage, la cuisine, et qui s'occupent des enfants. On est en 1962, les lois raciales font autorité. En quarante ans de service, Aibileen a appris à tenir sa langue. L'insolente Minny, sa meilleure amie, vient tout juste de se faire renvoyer. Si les choses s'enveniment, elle devra chercher du travail dans une autre ville. Peut-être même s'exiler dans un autre Etat, comme Constantine, qu'on n'a plus revue ici depuis que, pour des raisons inavouables, les Phelan l'ont congédiée. Mais Skeeter, la fille des Phelan, n'est pas comme les autres. De retour à Jackson au terme de ses études, elle cherche à découvrir pourquoi Constantine, qui l'a élevée avec amour pendant vingt-deux ans, est partie sans même lui laisser un mot. Une jeune bourgeoise blanche et deux bonnes noires. Personne ne croirait à leur amitié ; moins encore la toléreraient. Pourtant, elles sont liées par un projet secret qui les met toutes en danger, l’écriture d’un livre qui remet en cause les conventions sociales de leur époque et leurs conditions de travail.

J'ai terminé de lire ce roman il y a quelques jours, et j'ai beaucoup aimé ce livre. L'histoire est passionnante, les personnages sont très attachants ; on est tour à tour ému, révolté ou amusé. C'est un roman qui parle du quotidien des femmes de cette époque, et qui oblige à réfléchir. Car si les bonnes ne sont pas toujours bien traitées par leurs patronnes, on se rend également compte que leurs patronnes sont prisonnières de tout un réseau de conventions (avoir un mari, des enfants, être bien habillée, savoir cuisiner, respecter les règles mondaines de l'endroit...). A lire absolument !

mardi 25 octobre 2011

Persuasion ITV 2007 versus Persuasion BBC 1995.

Je reste dans la note "period drama" en évoquant les deux adaptations télévisées du dernier roman de Jane Austen, Persuasion. ;) D'un ton plus grave que les œuvres précédentes de la romancière, il raconte les retrouvailles d'Anne Elliot avec Frederick Wentworth, dont elle a repoussé la demande en mariage huit ans auparavant, persuadée par son amie Lady Russell des risques de cette union avec un jeune officier de marine en début de carrière, pauvre et à l'avenir incertain. Mais alors que la guerre avec la France s'achève, le capitaine Wentworth revient, fortune faite, avec le désir de se marier pour fonder un foyer. Il a conservé du refus d'Anne Elliot la conviction que la jeune fille manquait de caractère et se laissait trop aisément persuader.




Grâce à Emjy qui m'a très gentiment prêté le dvd, j'ai regardé l'adaptation ITV 2007 hier soir ; j'ai bien aimé, mais j'avoue que ne pas avoir été spécialement transportée.

Pourtant, cette adaptation télévisée a beaucoup de qualités : les acteurs principaux d'abord, qui sont très bons ; le scénario, plutôt bien ficelé (même si certaines scènes de la fin ont été "oubliées"), un parti pris de simplicité dans la manière de filmer (les décors, les intérieurs et les paysages sont très beaux).

Mais voilà : mon coeur appartient à la version de 1995. ;)

Cependant, je reconnais que Rupert Penry Jones est absolument charmant : je redoutais que ce joli blondinet ne soit pas à la hauteur, mais je reconnais qu'il joue très bien, là où Ciaran Hinds imposait un physique beaucoup plus buriné.

Quant à Sally Hawkins, je la trouve très bien également, quoique peu mise en valeur physiquement et vestimentairement (j'attendais sans cesse qu'elle s'épanouisse tout au long du téléfilm, et bien j'en ai été pour mes frais : pourtant, Amanda Root, dans la précédente version, peut vraiment exceller dans l'art d'avoir l'air peu épanouie, mais il y a un moment dans le film où elle devient très belle, où elle retrouve des couleurs en somme ; dans la version 2007, je n'ai jamais eu ce sentiment).

Quant aux rôles secondaires, quoique bien interprétés, ils passent un peu à la trappe dans la seconde partie, alors qu'il avaient droit à un vrai développement dans l'adaptation de 1995, qui par ailleurs est peut-être plus intéressante visuellement parce qu'elle prend le parti d'être assez réaliste et de jouer sur les couleurs chaudes et froides (la version de 2007 joue essentiellement sur des couelurs froides : bleu, mauve...).

Enfin, les moments où Sally Hawkins tient son journal intime et s'adresse à la caméra m'ont paru un peu faciles : Persuasion n'est pas un roman où m'héroïne dit "je", ses sentiments sont suggérés. J'aurais aimé qu'il en aille de même dans cette adaptation. C'était un peu bizarre de voir l'héroïne sans cesse nous prendre à parti ; ça donnait un caractère presque trop intime à l'histoire.

Au sujet de la fin, dont on dit souvent qu'elle a été baclée, faute des moyens financiers nécessaire, j'y étais préparée : la scène de course-poursuite m'a paru assez peu crédible, mais bon, à la limite ça passe. En revanche, la scène du baiser m'a paru très maladroite, et ne parlons pas du final, que je trouve limite gnan-gnan. Je trouve d'ailleurs que cette adaptation fait la part belle à la mélancolie, et que c'est un tout petit peu dommage, parce que même si c'est la tonalité générale du roman, d'autres traits plus piquants viennent la relever et la fin s'ouvre quand même sur un espoir. Et puis il manque la scène de la lettre, et ça, c'est limite criminel, parce qu'elle est tellement plus intéressante qu'une banale scène de baiser, ou que le fait qu'Anne retrouve sa demeure d'origine !

Ceci dit (parce que je me rends compte que j'ai l'air très critique) c'est une adaptation de bon niveau, très agréable à regarder. Mais autant Emma m'a paru bénéficier d'une très bonne adaptation en 2009, autant Persuasion ITV 2007 me paraît à retravailler (car je ne considère pas du tout la version de 1995 comme un "must" absolu, même si je l'apprécie beaucoup).

Au tour de l'adaptation BBC 1995 à présent ! ;)




J'aime beaucoup cette adaptation, en particulier pour le jeu des acteurs principaux, que je trouve tout simplement remarquables : Ciaran Hinds, avec son visage buriné et viril, fait un parfait capitaine Wentworth ; quant à Amanda Root, le spectateur a le plaisir de la voir embellir au fur et à mesure que le film se déroule.

J'apprécie également beaucoup le fait que l'adaptation ait insité sur l'aspect réaliste des intrigues de Jane Austen, malheureusement souvent occulté dans certaines adaptations, certes agréables à regarder, mais un peu trop acidulées et rose bonbon à mon goût, alors qu'il me semble que l'auteur d'Orgueil et Préjugés aborde mine de rien, les problèmes touchant à la société de son époque, en particulier le statut des femmes, et le rôle de l'argent et du mariage dans leur vie.

Je trouve que les acteurs qui jouent les roles secondaires sont également bons, même si certains ont pu trouver leur jeu caricatural. Pour ma part, ils m'ont aidé à mieux comprendre les touches d'humour qui émaillent ce roman à l'atmosphère plutôt automnale et mélancolique. Le père et la soeur aînée sont vraiment présentés comme snobs et odieux ; quant à l'autre soeur d'Anne Elliot, qui souffre manifestement d'hypocondrie et qui est si bien jouée par la soeur d'Emma Thompson, j'ai apprécié qu'on nous la montre pour la première fois en train de se moucher parce qu'elle est enrhumée : cela rappelle les dures conditions de vie de l'époque, où la vie et la santé étaient tout de même assez précaires, puisqu'on pouvait mourir d'un simple rhume.

L'adaptation m'a également beaucoup apporté, dans le sens où j'ai mieux compris ce qui se passait sur la jetée de Lyme, scène que j'avais du mal à me figurer en lisant le roman. Grâce à l'adaptation, j'ai pu visualiser ce qui se passait lors de cet épisode pivot du roman, et que j'avais du mal à appréhender au cours de ma lecture.

J'aime beaucoup la scène de dîner, de piano et de danse du début, lorsque Frederic Wentworth est invité chez les Musgrove, et le courage d'Anne, qui essaie de faire bonne figure, alors que tout ceci doit être bien douloureux pour elle.

J'aime également la scène dans le magasin, lorsqu'il pleut, la scène du concert, la scène de la lettre, la scène de demande en mariage, et la fin, même si le baiser et la scène du bateau n'étaient peut-être pas absolument indispensables. Ceci dit, j'aime bien le défilé de Carnaval avec les comédiens de cirque qui a lieu lorsqu'Anne et Frederic se retrouvent enfin, elle donne une note de couleur et de gaieté.

Je me suis longtemps interrogée sur le sens de ce défilé au moment de la scène du baiser, et j'y vois une représentation symbolique de la société, peuplée de gens déraisonnables qui jouent la comédie sociale tout le temps et ne laissent jamais tomber le masque. Au milieu d'eux, Frederic et Ann apparaissent comme les seuls êtres véritablement purs de cette histoire, car les sentiments qu'ils éprouvent l'un pour l'autre sont vrais et sincères.

Enfin, j'aime beaucoup le jeu sur les couleurs, et la manière dont les scènes à la bougie sont filmées ; il y a en effet, sur le plan de la réalisation, une alternance de scènes tantôt dans les tons bleus (qui évoquent la mer, le froid, la solitude), tantôt dans les tons rouges (qui évoquent vraisemblablement la flamme de la passion). Il est d'ailleurs intéressant de constater que la scène finale se déroule sur un navire, dans un contexte maritime donc, mais que les couleurs sont celles du soleil couchant.

Bref, c'est une adaptation que j'aime beaucoup, malgré quelques maladresses, et qui reste ma préférée à ce jour.

dimanche 16 octobre 2011

The Artist, de Michel Hazanavicius (2011).



L'histoire : Hollywood 1927. George Valentin enchaîne les films et les succès. Son art de la pantomime en a fait une vedette du cinéma muet. L'arrivée des films parlants va tout boulevreser. Ne croyant pas à cette nouvelle technique, il rate le train en marche et sombre peu à peu dans l'oubli. Peppy Miller, jeune figurante qu'il a aidée dans sa carrière, va elle, être propulsée au firmament des stars. Ce film raconte l'histoire de leurs destins croisés, ou comment la célébrité, l'orgueil et l'argent peuvent être autant d'obstacles à leur histoire d'amour.



J'ai beaucoup aimé ce film que j'ai été voir il y a huit jours. Je craignais que le tapage médiatique qui entoure sa sortie soit un peu surfait, mais en fait, pas du tout ! C'est un film qui rend un très bel hommage au cinéma en évoquant le passage du muet au parlant, et rien que pour cela, il mérité d'être vu.



D'autres réalisateurs l'avaient fait avant, comme Stanley Donen dans Chantons sous la pluie ou Billy Wilder dans Sunset Boulevard. Michel Hazanavicius parvient à ne pas tomber dans la redite, grâce à une manière de filmer en phase avec le présent, et très maîtrisée. Il n'y a pour ainsi dire presque pas de dialogues dans The Artist, tourné en noir et blanc, mais chaque scène est une petite merveille d'émotion, d'intelligence et d'humour. Le duo d'acteurs est formidable, et les références aux films d'autrefois extrêmement bien amenées.



J'ai particulièrement apprécié les scènes oniriques, avec le portemanteau, le cauchemar de Jean Dujardin qui n'arrive pas à parler, ou encore la scène où il est ivre et où sa conscience s'adresse à lui.



A voir, vraiment !

mercredi 12 octobre 2011

BBC's Emma 2009

Ce blog ressemble de plus en plus à une suite de come back plus ou moins réussis... j'ai l'impression d'avoir de moins en moins de temps à consacrer à la lecture et à la rédaction de billets, mais je m'accroche courageusement.

Ce mois de septembre - qui correspond pour moi à une nouvelle ville et une nouvelle vie - a été l'occasion pour moi de regarder enfin l'adaptation la plus récente d'Emma, le célèbre roman de Jane Austen. Ce period drama est enfin sorti en dvd en France, et vaut assurément le détour !



J'avais vu il y a un certain temps déjà les adaptations précédentes, qui datent des années 1990, mais malgré leurs indéniables qualités, je leur préfère largement cette adaptation télévisée beaucoup plus aboutie.

En regardant cette adaptation, j'ai été éblouie par le choix des décors et des costumes, dont les tons sont très lumineux et colorés. La musique est très belle, et participe à l'atmosphère extrêmement agréable de cette série, dont l'univers est particulièrement solaire.

Je suis très admirative de la qualité du scénario, qui est très fidèle à à l'intrigue austenienne, et qui rend parfaitement compte du caractère des différents personnages du livre en proposant quelques scènes inédites - en particulier au début, avec le récit de l'enfance de certains des protagonistes, ce qui permet d'éclairer leur psychologie.

Les comédiens sont tout bonnement excellents.

Romola Garai campe une Emma plus espiègle et plus juvénile que le souvenir que j'avais gardé du roman ; elle se comporte en enfant gâtée, mais sa tendresse pour son père et son souci des autres (même si elle l'exprime de manière parfois très maladroite) la rendent à la fois drôle et touchante. Son Emma est finalement plus sympathique que celle du roman, mais ce n'est pas un reproche. J'avoue que dans certaines scènes, le jeu de Romola Garai m'a un peu surprise (en particulier lorsqu'elle écarquille les yeux et rit de façon très juvénile).

Johhny Lee Miller incarne un très bon Mr Knightley, il est très crédible et les scènes où lui et Emma s'envoient des piques sont parmi mes préférées.

Michael Gambon est quant à lui absolument génial ; son Mr Woodhouse m'a beaucoup fait rire, alors que celui du roman a souvent tendance à m'exaspérer. C'est un personnage à la fois drôle et touchant ; j'aime beaucoup la scène où il interdit aux enfants de toucher au gâteau de mariage, au motif que c'est mauvais pour la santé, ou encore lorsqu'il sort avec deux écharpes alors qu'il fait très chaud !

J'ai également beaucoup apprécié l'acteur qui joue Mr Elton ; il suggère à merveille la prétention et la vanité de son personnage.

Jane Fairfax, Harriet Smith Frank Churchill et Miss Bates sont également fort bien joués. J'ai apprécié qu'on ne sombre pas dans la caricature avec Miss Bates ; l'actrice qui la joue le fait de manière très subtile. Idem pour Harriet Smith. Le personnage de Frank Churchill m'a franchement exaspérée sur la fin ; je trouve qu'il s'en tire finalement un peu trop bien par rapport à ce qu'il a fait... Jane Fairfax est très bien.

Quelques bémols : une scène de bal un tout petit peu en dessous de mes attentes, je m'attendais à être davantage emballée. Et une fin un tout petit peu expédiée à mon goût. Mais ce n'est vraiment rien au regard de cette adaptation extrêmement cohérente et agréable à regarder. Un vrai coup de coeur !

samedi 27 août 2011

Des films très attendus...

C'est bientôt la 68ème mostra de Venise, qui se déroulera du 31 août au 11 septembre 2011. A cette occasion devraient être présentés plusieurs films dont j'attends la sortie en France avec impatience et curiosité.



1°) A Dangerous Method, de David Cronenberg.

Sabina Spielrein est une jeune femme souffrant d'hystérie. Elle est alors soignée par le psychanalyste Carl Jung, dont elle devient rapidement la maîtresse. Cette relation se complique fortement lorsque Sabina entre en contact avec un autre psychanalyste, Sigmund Freud.



Un film sur la psychanalyse, pourquoi pas ? L'histoire me paraît un peu simpliste, mais si les acteurs et les dialogues sont bons... Je me demande surtout si Keira Knightley sera un peu moins mauvaise que d'habitude dans ce film. La bande-annonce m'a plutôt agréablement surprise, parce qu'elle s'y révèle plutôt crédible dans un rôle pour le moins inhabituel par rapport à ce qu'elle a pu faire auparavant.

2°) La Taupe, de Tomas Alfredson

Durant la période de la Guerre Froide, un ancien espion, George Smiley (joué par Gary Oldman) est obligé de reprendre du service pour démasquer une taupe soviétique au sein du MI6.



Pour le coup, je suis beaucoup plus emballée par ce film. Adaptation du plus connu des romans d'espionnage de John Le Carré, cette adaptation s'offre un casting de luxe : outre Gary Oldman, on pourra y retrouver Colin Firth, Ciaran Hinds, Mark Strong, et bien d'autres. La bande-annonce semble très prometteuse : le réalisateur a apparemment su recréer l'ambiance de cette époque. La musique y est sans doute pour quelque chose.

3°) Wuthering Heights, d'Andrea Arnold


La réalisatrice n'a laissé filtrer que très peu d'informations sur cette nouvelle adaptation du chef d'oeuvre d'Emily Brontë, et a choisi de s'entourer d'acteurs très peu connus du grand public. L'exercice qui consiste à adapter Les Hauts de Hurlevent pour la énième fois est pour le moins risqué ; espérons cependant que cette réalisation saura se montrer à la hauteur et proposer une vision intéressante et originale du roman.

4°) Poulet aux prunes, de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud.

Téhéran, 1958. Nasser Ali Khan (Mathieu Amalric)), musicien célèbre, a perdu le goût de vivre. Plus aucun instrument ne semble pouvoir lui redonner l’inspiration depuis que son violon a été brisé. Sa tristesse est d’autant plus forte que son amour de jeunesse, rencontré au coin d’une rue peu après cet incident, ne l’a pas reconnu. Après avoir cherché en vain à remplacer cet instrument reçu autrefois de son maître de musique, Nasser en arrive à la seule conclusion possible : puisque aucun violon ne peut plus lui procurer le plaisir de jouer, il se mettra au lit pour attendre la mort. Il envisage alors toutes les morts possibles : être écrasé par un train, sauter d’une falaise, se tuer d’une balle dans la tête, faire une overdose de médicaments… mais ne trouve aucune de ces issues digne de lui. Après tout, il était le meilleur violoniste de son temps : Nasser Ali Khan.


Les réalisateurs de Persepolis reviennent nous surprendre avec un film pour le moins original et prometteur. Marjane Satrapi adapte là son propre roman graphique, Poulet aux Prunes. L'intrigue se passe toujours à Téhéran mais, cette fois-ci, pas d'animation mais des acteurs de chair et d'os. C'est un parterre d'acteurs impressionnant qui se donnent la réplique dans son film : Mathieu Amalric, Jamel Debbouze, Maria De Medeiros, Edouard Baer ou encore Chiara Mastroianni.



5°) Sal, de James Franco.

Il s'agit d'un biopic sur Sal Mineo, le partenaire de James Dean dans La fureur de vivre, premier acteur hollywoodien à assumer son homosexualité au grand jour.

Enfin, un outsider présenté hors compétition : W.E., réalisé par Madonna. Ce film, qui retrace les amours d'Edward VII avec l'Américaine Wallis Simpson, divorcée américaine pour laquelle il renonça au trône d’Angleterre, surfe aparemment sur le succès du Discours d'un roi. Le nom de la réalisatrice fait un peu peur (jusqu'ici, Madonna n'a jamais vraiment convaincu au cinéma), mais les choix faits pour le casting seraient judicieux.

Espérons simplement que W.E. soit un peu plus qu'une bluette vaguement sulfureuse...

jeudi 25 août 2011

Affaires étrangères, d'Alison Lurie.

J'ai découvert Alison Lurie par le biais de ses deux essais consacrés à la littérature enfantine, Ne le dites pas aux grands et Il était une fois... et pour toujours, deux livres que je ne peux que recommander à ceux qui s'intéressent à ce thème, car ce sont des ouvrages très clairs, jamais ennuyeux, dans un style à la fois malicieux et pétillant d'intelligence.

Suite à cette découverte, j'avais très envie de découvrir Alison Lurie romancière - c'est maintenant chose faite avec la lecture de son roman le plus célèbre, Liaisons étrangères, dont j'ai beaucoup aimé les thèmes et l'écriture.



Le premier chapitre du livre nous fait le portrait d'une universitaire américaine de 54 ans, Virginia Miner, dite Vinnie, spécialiste de la littérature enfantine, assez laide, au physique de petite souris. Ce personnage, qui peut nous faire songer, par certains aspects, à Alison Lurie elle-même, prend l'avion pour se rendre à Londres : elle a en effet obtenu une bourse qui va lui permettre de passer six mois en Angleterre pour faire ses recherches, ce dont elle est ravie, car elle considère ce pays comme sa patrie d'adoption. Dans l'avion, elle fait la connaissance de Chuck Mumpson, son exact opposé : ancien ingénieur spécialisé dans les systèmes d'élimination des déchets, il a tout de l'Américain moyen, il porte des bottes de cow boy et un imperméable en plastique hideux. Il est complètement inculte : il incarne tout ce que Vinnie, avec ses préjugés universitaires, déteste.

Le deuxième chapitre nous présente un personnage bien différent, Fred Turner, un très bel et jeune universitaire qui travaille dans le même département que Virginia Miner, lui aussi pour 6 mois à Londres. Il tente tant bien que mal de se remettre de sa séparation d'avec sa femme, qui devait partir avec lui et qui est restée au Etats-Unis, à cause d'un différend les opposant. Contrairement à Vinnie qui adore Londres, Fred ne trouve aucun charme à la ville, jusqu'à ce qu'il rencontre une actrice spécialisée dans les period dramas de la BBC, Rosemary Radley, plus âgée que lui, mais extrêmement séduisante.

Le livre d'Alison Lurie va alterner les points de vue de ces deux personnages, en nous livrant avec beaucoup de finesse leur point de vue sur l'Angleterre, et en nous dévoilant leur état d'esprit suite aux rencontres qu'ils vont être amenés à faire. On ne s'ennuie pas - passé le premier chapitre, le livre est bien rythmé, et on prend plaisir à suivre ces personnages que tout semble opposer, mais qui, mis en présence, contribuent à révéler de quoi sont faits les uns et les autres. Le regard de l'auteur sur ses personnages, sur l'Angleterre et sur l'Amérique est vif et acéré, souvent drôle - le livre a su me toucher, alors qu'au départ, je ne trouvais pas beaucoup d'intérêt à cette souris de Vinnie. Il y a beaucoup d'honnêteté et de justesse dans la façon dont les personnages sont dépeints, et ce livre s'avère très agréable à lire. J'aimerais beaucoup voir ce livre adapté au cinéma, car à mon avis, il y a moyen d'en faire un très bon film. Affaires étrangères a d'ailleurs été adapté à la télévision avec Joanne Woodward dans le rôle principal.

samedi 20 août 2011

Loin de la foule déchaînée, de Thomas Hardy.



J'ai lu ce livre la semaine dernière, et j'ai beaucoup aimé. L'édition publiée par Sillage est très agréable à lire ; la qualité du papier utilisé pour la couverture et pour les pages du livre y est pour quelque chose. La traduction m'a paru bonne : pas de barbarismes, pas de mots inventés, une langue fuide et claire.

J'avais lu il y a plusieurs mois le roman graphique de Posy Simmonds qui s'inspire de ce livre de Thomas Hardy, et vu son adaptation cinématographique par Stephen Frears : j'étais donc très curieuse de voir ce que ces deux oeuvres devaient au livre de Thomas Hardy.

J'ai été très surprise de découvrir qu'au final, pas grand chose, si ce n'est le cadre du roman et ses personnages principaux - une femme et ses trois soupirants - encore que les caractères de ces quatre personnages soient finalement assez éloignés du livre. Le roman graphique de Posy Simmonds et le livre de Thomas Hardy ont un fil conducteur, mais les deux oeuvres sont clairement indépendantes l'une de l'autre - ce sont des créations originales, dans le sens où le roman graphique de Posy Simmonds n'est pas qu'une vague adaptation de l'intrigue revue à la sauce contemporaine, tant s'en faut.

En effet, première surprise quant on ouvre le roman, Tamara Drewe devient Batsheba Everdene, une jeune femme d'une grande beauté et d'un caractère impétueux qui hérite à vingt ans d'un beau domaine, qu'elle dirige seule. Assez différente de l'héroïne de Posy Simmonds, elle partage néanmoins avec elle la même superficialité, même si tout compte fait elle apparaît plus sympathique que la journaliste de presse à scandale dont il est question dans le roman graphique. Batsheba a des défauts, mais elle sera amené à évoluer. De plus, c'est le portrait d'une jeune femme finalement très indépendante dont Thomas Hardy nous fait le portrait, ce qui est plutôt rare dans les romans écrits à cette époque, qui plus est sous la plume d'un romancier masculin.

Autre personnage important du roman, Gabriel Oak, un ancien soupirant de Batsheba ayant connu des revers de fortune, qui lorsqu'un incendie se déclare dans la propriété de Batsheba, va appporter une aide providentielle pour sauver ses récoltes. On retrouve le personnage à travers lui le personnage du jardinier créé par Posy Simmonds, Andy, mais plus approfondi, et là encore, plus sympathique. Car les épreuves, au lieu d'aigrir Gabriel, vont lui permettre d'acquérir une sagesse qui lui sera bien utile lors des coups durs qu'il va être amené à subir.





Reconnaissante du service que Gabriel lui a rendu, Batsheba lui procure un emploi parmi ses gens, mais devient l'élue de deux autres prétendants, bien décidé l'un et l'autre à obtenir sa main : le vieux fermier Boldwood, d'origine aristocrate, qui va tomber fou amoureux de Batsheba suite à la réception d'une carte de saint Valentin, et le séduisant militaire Troy, à qui bien peu de femmes savent résister.

Ce qui est intéressant dans ce roman, c'est, outre les rebondissements romanesques, sa qualité d'écriture. Thomas Hardy est dans son élément lorsqu'il décrit à petites touches la région imaginaire du Wessex, calquée qur son Dorset natal. On découvre dans son roman la vie des paysans, leurs conversations - souvent fort drôles - au café du coin, les préoccupations des fermiers de la région. Et contre toute attente, c'est passionnant, tout comme le sont les protagonistes de cette histoire, dotés chacun d'une personnalité propre. La plupart sont très attachés à leur région, à la terre, et tous seront amenés à évoluer en fonction des circonstances de leur vie. Les péripéties qui émaillent ce roman sont parfois invraisemblables ou prévisibles, la leçon de morale qu'on peut tirer de cette histoire légèrement édifiante sur les bords, mais Thomas Hardy réussit à donner vie à ses personnages et à cette région rurale de l'Angleterre, et ce avec beaucoup de talent. On ne s'ennuie jamais à la lecture de ce roman qui réserve bien des surprises au lecteur. Bref, ce livre est un vrai coup de coeur, et j'ai bien envie maitenant de m'essayer au Maire de Caterbridge.

vendredi 19 août 2011

Papotage n°1





Les livres que l'on lit et les films que l'on voit ne méritent pas forcément un billet à part entière (surtout quand, comme moi, on a un retard phénoménal dans la mise à jour de son blog) : je reprends donc une idée de Céline, du Blog Bleu, pour évoquer rapidement les livres que j'ai lus et les films que j'ai vus dernièrement.

Lu dernièrement :

- Ivanhoé à la rescousse, de Thackeray. J'aime beaucoup cet auteur, mais ce petit livre qui parodie l'oeuvre de Walter Scott m'a paru assez anodin.

- Le secret de Lady Audley, de Mary Elizabeth Braddon. Une lecture pas désagréable, si l'on aime les romans-feuilletons qui se déroulent à l'époque victorienne. A consommer avec modération cependant : certes, on ne s'ennuie pas, mais certaines péripéties sont prévisibles, et le système des personnages souvent manichéen.

- Derrière le masque, de Louisa May Alcott. Intéressant en ce qu'il permet de découvrir une autre facette de cet auteur. Le livre met en scène une gouvernante intelligente, immorale et manipulatrice, servie par ses talents de comédienne. Pas un grand roman cependant : on sent que l'auteur a trop peu d'expérience de la vie pour insuffler le souffle nécessaire à une grande histoire. Un roman bien écrit cependant.

- La fin d'une liaison, de Graham Greene. Première incursion de ma part chez cet auteur, avec un roman popularisé par l'adaptation cinématographique récente. Le titre est cependant trompeur : il s'agit moins d'un roman d'amour que du récit d'une quête spirituelle. Les personnages sont à la recherche de Dieu, le tout dans le contexte des années 1950. Moins tourmenté que Bernanos, mais superbement écrit cependant, sur un thème rien moins que facile.

- L'auberge de la Jamaïque, de Daphné du Maurier. Quand on ne sait pas quoi lire, on se dit qu'en tant qu'auteur, Daphné du Maurier ne saurait complètement nous décevoir. Agréablement surprise par ce roman, dont je n'avais pas toujours entendu dire grand bien.

Cette histoire de pirates est tout bonnement très prenante ; j'avais vu le film de Hitchock il y a quelques années, mais les deux intrigues sont sensiblement différentes. L'héroïne, Mary Yellan, est une femme forte ; par dessus tout, il y a ces magnifiques descriptions de paysage qui ne peuvent pas ne pas faire songer aux Hauts de Hurlevent d'Emily Brontë.

Quelques faiblesses cependant - le personnage du méchant ne m'a pas complètement convaincue, on a du mal à comprendre ces motivations. Il y a quelque chose d'immature dans ce roman, mais c'est aussi ce qui en fait le charme. Le côté enfantin de l'héroïne permet le déferlement d'une certaine violence.

Vu en dvd :

- Elle et Lui, de Leo MacCarey. Vu ce film en urgence, histoire d'honorer mon challenge "Un printemps avec Cary Grant". C'est le genre de film dont je repousse sans arrêt le visionnage, à cause de sa dimension mélodramatique. J'anticipe l'effet qu'il peut produire sur moi - un gros coup de blues si le film est efficace, une irritation difficile à réprimer si le film est mauvais. Au final, j'ai beaucoup aimé. C'est une belle histoire, que Leo Maccarey prend le temps de filmer, avec deux comédiens merveilleux, Cary Grant et Deborah Kerr, tout en justesse et en sensibilité.

La première partie du film débute sur le mode de la comédie ; la seconde partie du film est plus mélancolique, mais très touchante. On est dans la plus pure tradition mélodramatique, mais jamais dans le tire-larmes. Au fur et à mesure que l'intrigue se déroule, les personnages gagnent en profondeur et en intensité... La mémoire et la religion jouent un rôle à la fois discret et prépondérant dans le film, grâce entre autres au personnage de la grand mère de Cary Grant. La dernière scène est magnifique.

- Le grand alibi, d'Afred Hitchcock. Pas un chef d'oeuvre, mais un très bon film d'Hitchcock quand même. Bien aimé le jeu de Jane Wyman que je ne connaissais pas, l'aspect gentiment vaudevillesque de certaines scènes et le jeu des acteurs qui jouent les parents de l'héroïne du film. Outre ces qualités, l'intrigue policière m'a paru bonne (je me suis fait complètement avoir par le flash-back initial), les acteurs sont bons et certaines scènes sont de vrais petit bijoux d'humour, mais Marlène Dietrich n'a pas un rôle très intéressant - c'est simple, elle m'a paru la caricature d'elle-même, dans cet enième rôle de femme fatale. Un film à voir cependant, car on passe un très bon moment, et les scènes où il y a des taches de sang annoncent d'autres films du maître.



- Le procès Paradine, du même réalisateur. Un avocat est chargé de défendre une femme accusée d'avoir tué son mari. Il tombe peu à peu amoureux d'elle. Une intrigue prometteuse pour un film décevant. On peine à retrouver la patte du grand Hitchcock dans ce film. Gregory Peck semble peu à l'aise dans le rôle de l'avocat, et Ann Todd est assez quelconque. Seuls la très belle Alida Valli dans le rôle de Mrs Paradine et Louis Jourdan dans le rôle du valet d'écurie parviennent à insuffler au film une dimension tragique. A noter, la présence de Charles Laughton et d'Ethel Barrymore au casting.

mercredi 13 juillet 2011

Laissez-vous tanter...

En ce moment, je suis en plein déménagement, ce qui explique que je sois si peu présente dans les parages... mais si vous avez besoin d'une lecture fraîche et divertissante pour cet été, je ne peux que vous recommander ces deux ouvrages de Patrick Dennis, écrits dans les années 1950 et remis au goût du jour grâce à une réédition récente :



Pour en savoir plus sur le premier tome, je vous recommande cet article :

http://www.lesinrocks.com/livres-arts-scenes/livres-arts-scenes-article/t/46124/date/2010-06-19/article/tante-mame-un-petit-bijou-fifties-reedite/

Le deuxième tome donne l'impression d'être plus court et mieux écrit ; basé sur le voyage autour du monde du personnage qui donne son nom au roman, il est au moins aussi cocasse que le précédent. Tante Mame, un personnage excentrique et anticonformiste à découvrir de toute urgence !

samedi 4 juin 2011

Une partie de cache-cache, d'Elizabeth Taylor.

J'ai fini Une partie de cache-cache jeudi soir, et j'ai plutôt bien apprécié ce roman, même si je ne le trouve pas aussi réussi que Mrs Palfrey, hôtel Claremont et Angel. Cependant, c'est un roman très bien écrit (même si par moment, il y a deux ou trois bizarreries au niveau de la traduction). Elizabeth Taylor a une manière de voir le monde très acerbe, très ironique, mais aussi très sensible, avec deux ou trois références à des auteurs britanniques et français extrêmement renommés, comme Emily Brontë, Flaubert ou Daphné du Maurier. Les héros ne sont pas reluisants, mais on s'y attache quand même, et ce n'est pas l'un des moindres talents de l'auteur que de nous faire sympathiser avec une héroïne assez gauche, un comédien raté et un bourgeois grisonnant. La fille de l'héroïne et la relation affective qu'elle noue avec son professeur de grec est plutôt bien vue, de même que la description des mères des héros, suffragettes ou comédienne extravagante. La psychologie des personnages est très fine, et l'humour bien présent. Sans être un coup de coeur, probablement le meilleur livre que j'ai lu au cours des derniers mois.

Au programme pour ce mois de juin, cette série de livres que je viens de me procurer :




Et le film Elle et Lui de Leo McCarey, avec Cary Grant et Deborah Kerr :


mercredi 11 mai 2011

The shop around the corner, d'Ernst Lubitsch (1940).

A Budapest, Alfred Kralik et Klara Novak travaillent dans la boutique de maroquinerie de Monsieur Matuschek. Les deux employés s'entendent comme chien et chat... Alfred correspond par petites annonces avec une femme qu'il n'a jamais vue ; il découvre bientôt que cette mystérieuse inconnue n'est autre que Klara, l'employée qu'il déteste au magasin. Sans révéler à celle-ci la vérité, il cherche à se rapprocher d'elle et à s'en faire aimer.


The shop around the corner met en scène des employés, personnages réels et ordinaires, dont la fragilité et les mesquineries, sont observées avec tendresse et humanité par Lubitsch. Ce film est un véritable bijou : les comédiens sont absolument remarquables par la justesse de leur jeu, et les scènes s'enchaînent parfaitement.





Si vous n'avez pas encore vu ce film, il faut vous le procurer immédiatement : vous ne pourrez pas le regretter !



mardi 3 mai 2011

Les soeurs Mitford

Dépoussiérage léger en fait... la chaleur ambiante me rend très paresseuse !

Chose promise, chose due, voici un billet sur les soeurs Mitford. J'ai découvert la plus connue d'entre elle sur les recommandations d'une connaissance ; elle est en effet l'auteur de plusieurs romans qui ont remporté un grand duccès au moment de leur publication, et qui continuent à plaire à un large public :

Contrairement à ce que pourrait présager son titre légèrement "cul-cul la praline" (mièvre, si vous préférez), c'est à mes yeux le meilleur livre de Nancy Mitford, le plus auobiographique et le plus spirituel, aussi. Si vous ne devez en lire qu'un, c'est sur celui-là qu'il faut se jeter sans plus attendre !





Ce second opus est un peu moins drôle que le précédent, parce que l'auteur est moins en empathie avec ses personnages, mais reste cependant d'un bon niveau et réserve de bons moments.






Mmh... alors très honnêtement, ce troisième opus ne m'a pas beaucoup marquée : ça se lit très agréablement, mais sans plus.








Bon, et celui-là, malgré la présentation dithyrambique de l'éditeur, je l'ai trouvé bourré de clichés sur Paris.












Récemment, une maison d'édition a republié un ouvrage de Nancy Mitford qui n'avait pas été réédité depuis sa parution en 1935, et pour cause : l'auteur raillait la passion de ses deux soeurs, Unity et Diana, pour les chemises noires et Hitler.


Unity et Diana en Allemagne dans les années 1930


Unity Mitford se comportait en effet comme une véritable groupie vis-à-vis du dictateur, au point que les journaux anglais des années 1930 virent longtemps en elle l'une des maîtresses du maître du IIIème Reich, et Diana divorça de son premier mari pour épouser par la suite Mosley, un représentant politique de l'extrême droite en Grande Bretagne. L'attitude des deux soeurs et de leur mère durant cette période montre l'attirance d'une certaine frange de l'aristocratie anglaise, en perte de vitesse, pour les idéaux du fascisme.



Le livre de Nancy Mitford se veut drôle, et certaines répliques sont très spirituelles, mais l'intrigue est un peu délayée et les personnages du livre ne sont guère sympathiques.


Néanmoins, suite à sa lecture, j'ai eu envie d'en savoir plus sur cette famille assez déjantée, et je me suis plongée dans la biographie des soeurs Mitford par Annick Le Floc'hmoan. J'ai exprimé dans un précédent billet les réserves que j'ai contre ce type d'ouvrage, mais il faut reconnaître que cette journaliste a fait un travail d'investigation très sérieux, et que son livre se lit comme un roman :

Au début du XXe siècle, dans la noblesse anglaise encore flamboyante, naissent les célèbres sœurs Mitford. Leur destin sera hors du commun. Nancy, amoureuse de la France et de Gaston Palewski, gaulliste historique, devient une romancière célèbre. Diana brûle pour le fascisme anglais naissant et se compromet auprès de son chef de file ; Unity devient une proche amie de Hitler ; tandis que Jessica, l'avant-dernière de la fratrie, s'engage auprès des jeunes républicains espagnols avant de rejoindre le parti communiste. Seules Pamela et Déborah suivent la voie rêvée par leurs parents, et se marient dans le luxe et le conservatisme. A travers le portrait étonnant de ces femmes passionnées, prises dans les tourments de la crise économique et des deux guerres mondiales, ce document présente une vibrante traversée du siècle.

Où l'on réalise, en fait, que Nancy Mitford, pourtant brillante, élégante et spirituelle, eut une vie sentimentale triste et ratée. Le livre resitue la famille Mitford dans son siècle, et chacune des six soeurs fait l'objet d'un portrait détaillé ; toutes sont attachantes ; toutes présentent un grain de folie plus ou moins développé. Leur père, Lord Redesdale, n'avait-il pas l'habitude de dire : "Je suis normal, ma femme est normale, mais mes filles sont toutes plus folles les unes que les autres" ?


Mais ce livre, pour passionnant qu'il soit, ne remplace pas la lecture de La poursuite de l'amour ; d'ailleurs, sitôt cette biographie refermée, j'ai entrepris de le relire, avec grand bonheur, car ce roman n'a pas pris une ride !


A noter que La Poursuite de l'amour et L'amour dans un climat froid ont fait l'objet d'une adaptation télévisée par la BBC il y a quelques années.

mercredi 6 avril 2011

Avril enchanté, Elizabeth von Arnim.


Je n'ai malheureusement guère le temps de lire les billets écrits sur les blogs que j'avais l'habitude de suivre régulièrement, mais j'ai quand même deux bonnes nouvelles :

- la première, c'est que les soucis professionnels auxquels je faisais allusion dans un post précédent et qui m'ont beaucoup tracassé ces deux derniers mois sont en train de s'arranger à mon avantage ;

- la seconde, c'est que je pars en Italie dans quelques jours.

Du coup, ce billet est vraiment de circonstance, puisque ce livre d'Elizabeth von Arnim est réputé pour sa description de ce pays. ;)


L’intrigue débute sur une petite annonce : « A tous ceux qui aiment les glycines et le soleil. Italie. Mois d’avril. Particulier loue petit château médiéval meublé bord de la Méditerranée ». Comment résister à une pareille offre ? Mrs Lotty Wilkins, son amie Rose et deux autres colocataires se lancent dans l’aventure et partent seules, presque sans prévenir leurs époux, pour un séjour d’un mois dans ce château ; elles veulent y trouver le soleil, le repos et réfléchir sur leur vie passée et à venir.


J'ai trouvé ce petit livre extrêmement drôle, humain et attachant. la description de l'Italie est très belle, et ces personnages qu'un lieu enchanteur rend capable de se transformer et de devenir meilleurs est une invitation à l'optimisme. Elizabeth von Arnim n'oublie pas cependant d'épingler au passage nos petits travers, et c'est précisément cela qui met le sourire aux lèvres.

mardi 8 mars 2011

Chaînes conjugales, de Joseph Mankiewicz (1949).

Mankiewicz et moi, le début d'une grande histoire d'amour ? Je ne sais pas, mais j'ai vu ce film en décembre, et j'ai beaucoup aimé cette comédie douce-amère.

Le scénario est en effet un modèle d'intelligence : trois amies partent pour un pique-nique, lorsque leur parvient une lettre d'Addie Ross, qui leur annonce qu'elle s'est enfuie avec le mari de l'une d'entre elle... mais lequel ?

S'ensuivent alors trois flash back, au cours desquelles chacune des trois femmes se remémore sa vie conjugale, au cours de laquelle Addie Ross a joué un certain rôle.


Personnellement, j'ai trouvé que ces flash back n'étaient pas toujours amenés très habilement, mais j'ai apprécié que ce soit Addie Ross, dont on ne saura jamais à quoi elle ressemble tout au long du film, qui raconte l'histoire (la voix off est celle de Céleste Holm, la meilleure amie de Bette Davis dans All about Eve de Mankiewicz).

Premier flash-back, celui de Deborah (Jeanne Crain), la plus jeune, une fille issue de la campagne qui a travaillé pour l'armée et qui épouse un homme jeune, beau, riche et distingué, Brad. La soirée qu'il donne en l'honneur de sa jeune épouse pour la présenter à ses amis tourne à la catastrophe, tant la jeune épouse manque de confiance en elle ; elle a conscience que sa robe est affreuse, et elle a beaucoup trop bu pour calmer son anxiété. A côté d'elle, Addie Ross n'a aucun mal à incarner le summum de la classe... cette soirée tragi-comique sera cependant l'occasion pour Deborah de sympathiser avec Rita, qui se montre très solidaire vis-à-vis de sa nouvelle amie.

Deuxième flash-back, précisément celui de la blonde Rita (Ann Sothern), une épouse très moderne, puisqu'elle travaille pour la radio et gagne plus que son mari George, enseignant. Elle invite sa patronne dans le but d'obtenir un poste avantageux pour son mari, et là encore, la soirée tourne au drame : Rita a complètement oublié que c'était l'anniversaire de son mari (contrairement à Addie Ross qui lui offre un disque de Chopin ou de Schubert, je ne sais plus), la bonne - excellente Thelma Ritter - se comporte de manière tout à fait impossible -, et la patronne de Rita, venue accompagnée de son mari, est absolument imbuvable. Le tout donne lieu à une scène très réjouissante au cours de laquelle la mari de Rita, George (étonnant Stanley Kubrick) défend ses idéaux : bien qu'intellectuel et mal payé, il croit en l'éducation, et dresse une critique ironique et féroce de la radio, qui, sous prétexte d'éduquer les masses, les asservit à la société de consommation.

Dernier flash-back, celui de Laura Mae (merveilleuse Laura Darnell), une femme extrêmement belle et intelligente, mais issue d'un milieu très modeste, qui se rappelle comment elle a réussi à mettre le grappin sur son patron, Porter Hollingsway (Paul Douglas, parfait), un homme plus âgé qu'elle, plutôt rustre, mais qui a réussi à implanter une chaîne de magasins dans tout le pays. Avec beaucoup d'intelligence et de cynisme, Laura Mae allume son patron, tout en lui faisant clairement comprendre qu'il n'obtiendra aucune faveur, sauf s'il l'épouse. Mais l'on découvrira que tous deux sont en fait très amoureux l'un de l'autre, et souffrent d'une relation où le sentiment ne peut jamais s'exprimer.

Je ne raconterais pas la fin, mais j'ai beaucoup aimé l'histoire de ces trois femmes, particulièrement celle d'Ann Sothern et plus encore celle de Linda Darnell. Plus on avance dans le film, plus il augmente en intensité dramatique ; l'humour est très présent, et il y a beaucoup de finesse psychologique. L'étude de moeurs est particulièrement bien vue, ces trois femmes peinant à savoir qui elles sont et à trouver le bonheur dans une société où comptent avant tout le paraître et l'argent. Le film remporta l'oscar du meilleur scénario et celui de la mise en scène ; bien qu'il date de 1949, ces portraits de femmes ont conservé quelque chose de très actuel, de même que la critique de l'american way of life.


vendredi 4 mars 2011

Angel, d'Elizabeth Taylor (1957).

J'ai lu ce livre en février, et j'ai vraiment été très enthousiasmée par cette lecture.



Angel raconte l'histoire d'une jeune fille, qui, comme Emma Bovary, se nourrit de rêves et d'illusions dont le symbole est Paradise House, le domaine des riches aristocrates de sa région. Originaire d'un milieu modeste, rebelle, volontaire et mal élevée, contre toute attente, elle parviendra à vivre de sa plume en vendant des livres où son imagination exubérante met en scène des héroïnes à son image et des messieurs "forts comme des lions et qui pleurent comme des urnes", le tout dans des décors où le kitsch le dispute au ridicule. Incapable de voir le réel tel qu'il est, arrogante, prétentieuse, mais aussi solitaire et pathétique, elle connaîtra le succès, gagnera beaucoup d'argent et tombera amoureuse d'un peintre aristocrate, avant de connaître la déchéance.



Elizabeth Taylor se serait inspirée d'un écrivain adulé à l'époque de la reine Victoria, Marie Corelli, pour peindre cette héroïne capricieuse et insupportable ; grâce à sa plume fine, ironique et cruelle, elle parvient à nous la rendre terriblement émouvante, ce qui n'est pas un mince tour de force. A lire ce livre, on comprend que François Ozon s'y soit intéressé (la manière dont sont décrites les tenues de l'héroïne ne pouvait laisser indifférent un cinéaste de la couleur). Angel - qui aurait pu aussi s'appeler "Paradise House" est un livre que je recommande chaleureusement ; c'est un livre qui ne peut laisser indifférent. A signaler, la très belle préface de Diane Margerie, dont l'analyse est toujours aussi fine.



dimanche 27 février 2011

Le château du dragon, de Joseph Mankiewicz (1946).

Je reviens sur ce blog après un mois d'absence forcée - des soucis d'ordre professionnel ont mobilisé toute mon énergie ces derniers temps, et je n'avais le temps ni de vous lire, ni de vous écrire. Ces soucis ne sont pas encore derrière moi, mais j'estime avoir fait ce que j'avais à faire ; le reste ne dépend maintenant plus de moi.

Et comme je suis très en retard dans mes billets, je vais vous parler aujourd'hui d'un autre film de Joseph Mankiewicz, Le château du dragon.



Si vous avez aimé Jane Eyre de Robert Stevenson, Rebecca d'Alfred Hitchcock, et Mrs Muir et le fantôme de Joseph Mankiewicz, alors ce film est fait pour vous !

Miranda (la belle Gene Tierney), une fille de fermiers, est appelée au château de Dragonwyck, où vivent un cousin éloigné de sa femme, Nicholas Van Ryn (Vincent Price, qui se spécialisa ensuite dans les films d'horreur), son épouse malade et leur petite fille. Elle tombe amoureuse de Van Ryn qui, à peine devenu veuf, l'épouse. Lorsque meurt le fils né de cette union, Miranda découvre les secrets bien cachés de son mari, qui abuse des drogues, exploite ses paysans et... aurait assassiné sa femme.



Film au départ destiné à être réalisé par Ernst Lubitsch, adapté d'un best-seller qui remporta un succès foudroyant à l'époque et que Mankiewicz avait d'abord refusé d'adapter, le cinéaste a réussi à faire, à partir d'une trame à la fois mélodramatique et gothique, un film personnel. Dragonwyck est certes moins réussi que Mrs Muir and the ghost, mais n'en demeure pas moins extrêmement riche et signifiant, qu'on soit amateur de ce genre de film ou non : Le château du dragon est en effet un film gothique, mais aussi le récit d'un parcours initiatique avec une vision intéressante de l'image que l'Amérique a d'elle-même, un thriller au suspense haletant, et le portrait d'un personnage que ses vices rendent fascinant.

Chaque plan est une merveille d'intelligence, les dialogues sont fins et subtils, Gene Tierney apparaît à la fois très belle et très candide, et Vincent Price est étonnant dans ce rôle de grand seigneur méchant homme qui suscite au moins autant la pitié que le dégoût.

Un film que je ne juge peut-être pas forcément aussi réussi que ceux cités en préambule, mais qui reste d'un bon niveau.

mercredi 19 janvier 2011

Poupoupidou, de Gérald Hustache-Mathieu (2011).

J'ai un emploi du temps extrêmement chargé ce mois de janvier (pour changer ^^), aussi mardi, j'ai profité de ma journée pour aller me détendre et me poser devant Poupoupidou, un film de Gérald Hustache-Mathieu, avec Jean-Paul Rouve et Sophie Quinton.

Je ne savais pas trop à quoi m'attendre, les critiques que j'avais lues étaient plutôt élogieuses, mais la bande-annonce ne m'avait pas complètement convaincue. Et pour finir, j'ai trouvé ce thriller qui se déroule à Mouthe, la ville la plus froide du Jura, extrêmement drôle, cocasse et original.

L'histoire ? Un écrivain de polars à la James Ellroy enquête sur le suicide d'une Miss Météo francomtoise qui avait tendance à s'identifier à Marilyn Monroe. Très vite, il suspecte un meurtre maquillé en suicide... Malgré le peu de moyens, le film est très bien filmé (tous les détails ont du sens) et surprend par un ton et un humour résolument originaux ; en outre, les comédiens sont excellents, y compris les seconds rôles, qu'il s'agisse de la tenancière de l'hôtel habillée en gothique, ou de la coiffeuse locale, toujours vêtue de manière exotique... c'est en outre un très beau portrait de femme qu'il nous est donné de découvrir là, avec une réflexion toujours d'actualité sur la soif de célébrité et ses désagréments.

On songe à Laura d'Otto Preminger, où un détective enquête sur une femme assassinée dont il tombe peu à peu amoureux ; on songe aussi à Boulevard du crépuscule, où c'est un mort qui raconte en voix off ce qui s'est passé ; et, bien sûr, les références à la vie, aux chansons, aux photographies et aux films de Marilyn sont là en filigrane, mais pas besoin de bien connaître l'actrice pour apprécier le film, qui est filmé de manière résolument contemporaine.

En bref, un film à la fois sombre, frais et léger (oui, tout ça à la fois !), et un réalisateur et des acteurs à suivre.

PS : Et la bande-son est vraiment géniale ! ;)

samedi 15 janvier 2011

Poussière, de Rosamond Lehmann.

La Première Guerre mondiale vient de s’achever. À l’issue des ses études à Cambridge, Judith Earle, jeune fille de 18 ans, regagne la grande maison familiale au bord de l’eau. Elle assiste au retour de ses voisins, les cousins Fyfe, qu’elle a idolâtrés tout au long de son enfance solitaire. Dans une mosaïque qui fait alterner passé et présent, le lecteur est témoin du douloureux apprentissage sentimental de Judith qui, tour à tour, à des moments différents de sa courte existence, est tombée amoureuse de chacun des cousins… pour finir irrémédiablement déçue.

J'ai fini de lire Poussière de Rosamond Lehmann il y a quelques semaines. Bilan des courses ? Je ne sais pas trop si j'ai aimé ce roman ou pas. Je crois quand même que je l'ai apprécié. A vrai dire, je ne connaissais pas du tout cet auteur, et je ne savais pas trop à quoi m'attendre...

Poussière met en scène une jeune fille, Judith, et ses altermoiements amoureux. Elevé dans une quasi solitude - elle ne découvrira la vie en collectivité que fort tard, à Cambridge, et ses relations avec ses parents, même si elle aime beaucoup son père, sont assez distantes (il n'en est pour ainsi dire presque pas question dans le roman, ou fort tardivement). Judith est fascinée depuis l'enfance par la famille Fyfe qui vient passer ses vacances dans la maison d'à côté : Charlie, Mariella, Martin, Julien et Roddy, qui sont tous plus ou moins frères et cousins. Tout cela se déroule au lendemain de la seconde guerre mondiale, à la campagne, dans un milieu aisé.

En fait, ce qui est intéressant dans ce roman, c'est moins l'intrigue que la façon dont Rosamund Lehmann se fait le peintre de l'âme humaine et d'une nature toujours en fleur. Enfin, peintre est un bien grand mot, étant donné qu'elle décrit des sensations toujours en mouvement, et ce avec une grâce et un talent remarquables. J'ai beaucoup aimé certaines scènes, en particulier celle des jeunes gens qui font du patin à glace au début de la Deuxième partie, je crois. J'ai également bien aimé la partie qui se déroule à Cambridge, qui m'a parue beaucoup plus vivante et m'a fait penser à Maurice d'E.M. Forster, ou encore ou début de Retour à Brideshead, d'Evelyn Waugh, deux romans qui décrivent la vie à l'université. Rosamund Lehmann en propose une version féminine cette fois.

Judith, le personnage principal, accorde sans doute trop d'importance à ces voisins occasionnels, et aux rêveries et fantasmes qu'ils suscitent en elle. Elle vit à travers le regard qu'ils portent sur elle, et pour eux plutôt que pour elle-même. Elle voudrait avoir autant d'importance à leurs yeux qu'eux en ont pour elle.

L'Histoire avec un grand H est curieusement absente du roman, même si la première guerre mondiale apparaît en filigrane (elle tue Charlie, le plus séduisant et les plus faible de la famille Fyfe, qui avait épousé Mariella avant la guerre, et qui a eu un enfant de lui, Peter ; elle affecte les nerfs de Julien, qui apparaît comme celui ayant la sensibilité la plus exacerbée). Le fait que Judith, une femme, puisse étudier, montre aussi l'évolution des moeurs.

L'amitié de Judith avec Jennifer est ambiguë, comme le montrera la fin du livre, mais Judith est d'une telle candeur, d'une telle innocence, qu'elle ne s'en rend pas compte, ou ne veut pas le voir. Elle est amoureuse de Roddy, qui apparaît comme quelqu'un d'assez désinvolte (le roman suggère qu'il est davatantage intéressé par un garçon de son âge, Tony). Quoique belle et intelligente, Judith est inexpérimentée, elle est amoureuse de la famille Fyfe et voudrait se l'approprier, c'est pourquoi elle se tournera tour à tour vers Roddy, le bon Martin, Julien, qui la feront souffrir et réciproquement, avant de recevoir plusieurs révélations ou confirmations grâce aux lettres de Julien, Mariella et Jennifer à la fin du livre. Une fin qui nous laisse une héroïne terriblement désillusionnée, mais aussi, d'une certaine manière, libérée de la tyrannie d'elle-même et des autres : à elle s'ouvrent enfin tous les possibles...

C'est un roman difficile à appréhender, parce que parfois insaisissable ; il porte malgré lui les traces de la sensibilité qui l'a vu naître - ces gens extrêmement raffinés et cultivés, ces descriptions de corps jeunes et beaux, ce goût pour pour la nature, les fleurs et l'eau font songer à la poésie et à la peinture symboliste, et à l'art nouveau ; cette analyse fine et précise de l'amour, de l'adolescence et de l'amitié, à certains passages de La Recherche - Rosamund Lehmann et Marcel Proust ont parfois la même prose lumineuse, comme impressionniste ; certaines de ses descriptions font d'ailleurs penser aux peintres de ce mouvement, tant par leurs thèmes (déjeuner sur l'herbe, promenade en barque, etc) que par la manière dont elles sont menées (d'une certaine manière, Rosamund Lehmann est un peintre des impressions, dont la nature est d'être changeantes).



Le projet de Rosamund Lehmann fait également songer à l'entreprise de ses contemporains, Virginia Woolf et consorts, qui s'efforçaient de décomposer les sensations et de remettre en cause les codes et conventions romanesques. Sauf que Rosamond Lehmann est beaucoup moins intellectualiste que Virginia Woolf, et c'est tant mieux - il faut dire que je ne suis pas une très grande fan de Virginia Woolf, dont les écrits m'obligent à beaucoup de concentration, et qui en général me fichent la migraine. Rosamund Lehmann est plutôt à l'image de ses deux héroïnes - Jennifer et Judith - à la fois sensible et sensuelle.

C'est un roman de débutante, qui s'inspire sans aucun doute de la vie intérieure de son auteur, avec des fautes de débutante (par moment, certains dialogues sont quand même hautement improbables, on pourrait presque croire que c'est Judith qui en invente les réponses, tant on ne voit pas les gens parler comme ça "dans la vraie vie"), des longueurs, l'absence d'une intrigue vraiment reserrée, mais écrit avec beaucoup de talent, indéniablement.

Une photographie de Rosamond Lehmann, de son frère et d'un ami de la famille (?) qui pourrait très bien servir d'illustration au roman :

Livre offert par Summerday dans le cadre du Secret Santa organisé sur Whoopsy Daisy, et recommandé par Emjy, dont voici le billet :

L'avis d'Emjy